A - Cailloux
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Adrienne
Escandélia
catsoniou
Mesange
8 participants
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A - Cailloux
Au bord du torrent ou plutôt au milieu des cailloux parmi lesquels coule un filet d’eau, ma grand-mère, assise sur une pierre, les jambes croisées, nous regarde jouer ma sœur et moi. Nous construisons des fourneaux pour nos pains à cuire. Elle nous montre aussi comment fabriquer une poupée avec de l’herbe. C’étaient des jeux sans prétention auxquels je n’accordais pas grande importance. Après les vacances, j’’aurais tant aimé pouvoir raconter des choses plus intéressantes dans mes rédactions. D’autres enfants avaient voyagé ou visité une grotte, été au cirque …ça c’était passionnant ! Moi, je pensais n’avoir rien à dire. Pourquoi aujourd’hui ces jeux-là ont-ils autant de place dans ma biographie ? Ils occupent toute l’avant-scène de mes souvenirs de séjours auprès de mes grands-parents.
J’avance de cent pas et je me vois dans ma première colonie de vacances. Un peu à l’écart des autres, à l’orée du bois, près d’une souche, je crée un nid de mousse et de fleurs pour mes animaux : un peu de douceur pour mon cœur rempli de larmes.
Et si je recule de cent pas ? Voici mon père gambadant sur l’alpage, ramenant moutons et vaches à l’écurie, grimpant sur les plus hautes branches des sapins pour se balancer avec le vent, courant nu pied dans le pré, pleurant son chien abandonné à la fin de l’été. A la vallée, il n’y avait pas de place pour lui. Deux ans avant sa mort, mon père s’est mis à l’écriture et a laissé à ses trois enfants quelques textes émouvants, témoignant d’une grande sensibilité cachée à nos yeux.
Je me tourne vers la droite. Cent pas vers l’ouest. Un été à la montagne avec ma famille, mes enfants. Renouer avec mon passé, renouer avec celui de mon père, grimper à travers bois à pieds nus, dormir une nuit à l’auberge d’altitude et écouter le vent dans les sapins, contempler le ciel tellement plus étoilé, vivre une aventure.
Il reste quelques pas sur la gauche ! Ma petite-fille joue au bord du ruisseau, elle jette des cailloux dans l’eau. Ses pieds se mouillent, ses pas s’enhardissent. Courageusement, elle traverse le plan d’eau et parvient de l’autre côté, détrempée mais fière. Les racines affleurent en entrelacs tortueux. Un creux rempli de mousse accueille ma petite aventurière. Au-dessus d’elle, un papillon blanc volète. Je ferme les yeux : pendant un court instant, toutes les générations se rejoignent.
La Birse lors d'une balade près de chez moi. Ici ce n'est pas un filet d'eau
J’avance de cent pas et je me vois dans ma première colonie de vacances. Un peu à l’écart des autres, à l’orée du bois, près d’une souche, je crée un nid de mousse et de fleurs pour mes animaux : un peu de douceur pour mon cœur rempli de larmes.
Et si je recule de cent pas ? Voici mon père gambadant sur l’alpage, ramenant moutons et vaches à l’écurie, grimpant sur les plus hautes branches des sapins pour se balancer avec le vent, courant nu pied dans le pré, pleurant son chien abandonné à la fin de l’été. A la vallée, il n’y avait pas de place pour lui. Deux ans avant sa mort, mon père s’est mis à l’écriture et a laissé à ses trois enfants quelques textes émouvants, témoignant d’une grande sensibilité cachée à nos yeux.
Je me tourne vers la droite. Cent pas vers l’ouest. Un été à la montagne avec ma famille, mes enfants. Renouer avec mon passé, renouer avec celui de mon père, grimper à travers bois à pieds nus, dormir une nuit à l’auberge d’altitude et écouter le vent dans les sapins, contempler le ciel tellement plus étoilé, vivre une aventure.
Il reste quelques pas sur la gauche ! Ma petite-fille joue au bord du ruisseau, elle jette des cailloux dans l’eau. Ses pieds se mouillent, ses pas s’enhardissent. Courageusement, elle traverse le plan d’eau et parvient de l’autre côté, détrempée mais fière. Les racines affleurent en entrelacs tortueux. Un creux rempli de mousse accueille ma petite aventurière. Au-dessus d’elle, un papillon blanc volète. Je ferme les yeux : pendant un court instant, toutes les générations se rejoignent.
La Birse lors d'une balade près de chez moi. Ici ce n'est pas un filet d'eau
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
Re: A - Cailloux
D’autres enfants avaient voyagé ou visité une grotte, été au cirque …ça c’était passionnant ! Moi, je pensais n’avoir rien à dire.
J'ai connu cette impression dans ma campagne corrézienne. Une partie des petits copains partaient en colonie de vacances, ceci grâce à l'instituteur qui était responsable de l'ODCV de la Corrèze. Mes parents n'avaient que de petits moyens, mais peut-être pensaient-ils que c'était un luxe inutile ?
Il nous restait à la rentrée le souvenir des moissons et surtout du battage, son bruit très caractéristique et les hommes qui s'activaient autour de la batteuse comme des abeilles . Et puis, il y avait les repas de battage mémorables...
A la montagne, il y a une diversité de paysages qu'on appréciait pas toujours à sa juste valeur quand on était enfant. Le torrent de ta photo en est la preuve.
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A - Cailloux
Je ne sais pas pourquoi on ne sait apprécier les petits bonheur que tu nous dépeins dans ton texte, seulement quand il est trop tard ? Je me suis souvent posé la question : avions nous honte ? honte de notre modestie alors que nous aurions pu y puiser les plus grandes richesses ? Et qui nous culpabilisait à ce point ?
Je n'ai jamais fait de choses extraordinaires durant mon enfance, après non plus d'ailleurs. Je sais simplement qu'aujourd'hui je suis immensément riche de tous ces petits bonheurs et que pour rien au monde je ne voudrai les échanger contre une journée au cirque ou à la mer.
Oui, Cats, elles sont belles nos montagnes, leur beauté n'a pas de frontière.
Merci Mésange pour ce texte qui se déroule un peu comme des pas de danse sur des torrents musicaux, j'ai adoré les effectuer avec toi.
Je n'ai jamais fait de choses extraordinaires durant mon enfance, après non plus d'ailleurs. Je sais simplement qu'aujourd'hui je suis immensément riche de tous ces petits bonheurs et que pour rien au monde je ne voudrai les échanger contre une journée au cirque ou à la mer.
Oui, Cats, elles sont belles nos montagnes, leur beauté n'a pas de frontière.
Merci Mésange pour ce texte qui se déroule un peu comme des pas de danse sur des torrents musicaux, j'ai adoré les effectuer avec toi.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A - Cailloux
J'aime!
C'est exactement comme chez Victor Hugo "J'appelais cette vie être content de peu": c'est après, quand on ne l'a plus, qu'on se rend compte combien c'était unique et précieux... que c'était essentiel!
Je savoure moi aussi les souvenirs vécus avec mes grands-parents et j'incite tous les grands-parents d'aujourd'hui à consigner leurs propres souvenirs par écrit, pour léguer cette part si importante d'eux-mêmes à leurs petits-enfants :-)
C'est exactement comme chez Victor Hugo "J'appelais cette vie être content de peu": c'est après, quand on ne l'a plus, qu'on se rend compte combien c'était unique et précieux... que c'était essentiel!
Je savoure moi aussi les souvenirs vécus avec mes grands-parents et j'incite tous les grands-parents d'aujourd'hui à consigner leurs propres souvenirs par écrit, pour léguer cette part si importante d'eux-mêmes à leurs petits-enfants :-)
Adrienne- Kaléïd'habitué
- Humeur : brouillonne
Re: A - Cailloux
Ah là là, les rédactions de début d'année pas simple effectivement. J'ai beaucoup aimé tes pas en avant, en arrière, à gauche ou à droite. As-tu appris à ta petite fille à faire des poupées avec de l'herbe ?
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
Re: A - Cailloux
Merci Cats, Escandélia, Adrienne - aujourd'hui je sais apprécier les petites choses, elles me sont infiniment plus précieuses que toutes les "grandes" excursions. Et je sais qu'elles sont loin d'être inintéressantes, sauf qu'il faut savoir s'émerveiller et les regarder avec un œil dépourvu de jugement.
@Martine: hélas, je ne sais plus comment faire ces poupées , et ma grand-maman n'est plus là pour me le montrer, ni mon père qui saurait peut-être encore....
@Martine: hélas, je ne sais plus comment faire ces poupées , et ma grand-maman n'est plus là pour me le montrer, ni mon père qui saurait peut-être encore....
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
Re: A - Cailloux
J'aime comment tu relies toutes les générations et tous les souvenirs en te déplaçant de quelques pas.
madeleinedeproust- Kaléïd'habitué
- Humeur : littéraire
Re: A - Cailloux
Comme Mad, j'aime le lien qui unit toutes ces générations: juste quelques pas , comme si l,espace temps avait disparu.
J'ai aussi fait des poupées avec de l'herbe et on en faisait aussi avec des épis de maïs.
Contrairement à toi et délia, j'ai eu tres tôt conscience de ces petits moments de bonheur .,j'ai tres vite compris qu'ils ne faudrait jamais les,laisser filer.,
Zoizo tu écris comme tu chantes: avec une voix d'ange qui entraîne tous ceux qui t'aiment
J'ai aussi fait des poupées avec de l'herbe et on en faisait aussi avec des épis de maïs.
Contrairement à toi et délia, j'ai eu tres tôt conscience de ces petits moments de bonheur .,j'ai tres vite compris qu'ils ne faudrait jamais les,laisser filer.,
Zoizo tu écris comme tu chantes: avec une voix d'ange qui entraîne tous ceux qui t'aiment
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: A - Cailloux
Mésange, comme c'est beau et touchant ce que tu nous racontes ! Encore un peu j'allais rater ce retour à l'enfance.
Tu dis n'avoir rien à raconter dans les rédactions de rentrée ? Comme tu te trompes, riche de tous ces souvenirs !
Tu dis n'avoir rien à raconter dans les rédactions de rentrée ? Comme tu te trompes, riche de tous ces souvenirs !
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: A - Cailloux
Merci - Merci - Merci
Peut-être fallait-il que tout cela se concentre à l'intérieur de moi pour enfin le raconter sur Kalé
Peut-être fallait-il que tout cela se concentre à l'intérieur de moi pour enfin le raconter sur Kalé
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
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