A.La maison des souvenirs perdus
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Myrte
Amanda.
tobermory
7 participants
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A.La maison des souvenirs perdus
L'hiver serait long, il ne faisait que commencer.
Lui, ne pense pas à la durée de l’hiver, celle de la journée lui suffit. C’est un hiver à elle seule, de longues minutes, des heures interminables de marche sur la terre gelée, dans la bise glacée de cette lande sans fin. Où va-t-il dormir ? Rien à l’horizon, pas même une grange, pas même une ruine. Et maintenant cette maison bleue. Là où il aurait juré qu’il n’y avait que le sol nu un instant auparavant. Bleue comme un ciel d’été, bleue comme un bloc de banquise. A la fois rassurante et inquiétante. De toute façon il n’a pas le choix. Il s’avance, espérant trouver une cabane de jardin, un appentis où il sera au moins à l’abri du vent. Mais finalement il se dirige vers la porte d’entrée. Elle est entre ouverte et ça l’intrigue. Pourtant elle n’a pas l’air d’une maison inhabitée ; propre et nette, pas de signes de décrépitude, et tous volets ouverts.
Il tend l’oreille. Pas un bruit. Il pousse doucement la porte, entre dans le hall, pousse une autre porte et le voilà dans une grande pièce bien éclairée, occupée par une immense table recouverte de plats débordants de victuailles. Devant la table, une chaise, une seule, face à une assiette, une seule, accompagnée d’un verre, d’un couteau, d’une fourchette et d’une serviette, comme au restaurant. Il ne résiste pas, il s’assoit, se sert ici et là, avale goulument et s'octroie de longues rasades de vin. Une fois le gros de sa faim calmée, il prend la peine de savourer. Il se sent bien. Ce festin en fait remonter d’autres, des repas de fête, des noëls, des anniversaire, toute une convivialité chaude et bruyante. Il ne se souvenait même pas qu’il avait connu ça. Ces dernières années, il était devenu une épave, un être sans mémoire, aux souvenirs effilochés, ne se souciant que de l’instant.
La maison est toujours aussi silencieuse. Il quitte la pièce et pousse la porte de la suivante. C’est une chambre. Le grand lit tendu d’un tissu satiné bleu l’hypnotise. Il y a si longtemps qu’il n’a pas dormi dans un lit. Il s’allonge à même le couvre-lit et s’endort. C’est le soleil qui le tire du sommeil. Il s’étire voluptueusement. Au mur, la photo d’une plage bordée de végétation exotique. Le ressac vient chanter à ses oreilles. C’était il y a si longtemps, sa lune de miel quelque part sur une île, avec… comment s’appelait-elle ? Claudine, voilà. Séjour paradisiaque, nuits d’amour, journées de soleil.
Au fil des jours, il explore les pièces de la maison, elles sont innombrables. Dans chacune, un souvenir refait surface, du bonheur en vrac, sans chronologie, heures d’amitié, émerveillements d’enfance, voyages, soirées de convivialité, euphories de musique et de danse, plaisirs de faire plaisir. Tant de belles choses ! Et dire qu’il avait oublié tous ces épisodes d’une vie si riche. Alors qu’elle ait dérapé sur la fin, quelle importance ? D’ailleurs est-ce qu’elle a vraiment dérapé, il n’en est plus si sûr.
C’est la fin du jour, il s’est allongé sur le lit d’une nouvelle chambre, fatigué mais serein. Il sait qu’il vit ses dernières heures, les dernières d’une vie pleine et dense comme un fruit mûr. Il n’est pas tout seul, quelqu’un lui tient la main, épouse ? Enfant ? Ami ? Tout est fini, le néant l’accueille comme un berceau.
Nul n’a retrouvé trace du SDF. D’ailleurs il n’existait déjà plus pour personne. Sur la lande, rien à l’horizon, pas de maison bleue. Pourtant un jour ou l’autre, elle apparaitra aux yeux d’un vagabond en détresse, elle l’accueillera et lui donnera les souvenirs des moments heureux que sa pauvre vie ne lui a jamais accordés. Et qu’importe que les souvenirs soient vrais ou faux, du moment qu’ils enchantent la tête et l'âme ?
Lui, ne pense pas à la durée de l’hiver, celle de la journée lui suffit. C’est un hiver à elle seule, de longues minutes, des heures interminables de marche sur la terre gelée, dans la bise glacée de cette lande sans fin. Où va-t-il dormir ? Rien à l’horizon, pas même une grange, pas même une ruine. Et maintenant cette maison bleue. Là où il aurait juré qu’il n’y avait que le sol nu un instant auparavant. Bleue comme un ciel d’été, bleue comme un bloc de banquise. A la fois rassurante et inquiétante. De toute façon il n’a pas le choix. Il s’avance, espérant trouver une cabane de jardin, un appentis où il sera au moins à l’abri du vent. Mais finalement il se dirige vers la porte d’entrée. Elle est entre ouverte et ça l’intrigue. Pourtant elle n’a pas l’air d’une maison inhabitée ; propre et nette, pas de signes de décrépitude, et tous volets ouverts.
Il tend l’oreille. Pas un bruit. Il pousse doucement la porte, entre dans le hall, pousse une autre porte et le voilà dans une grande pièce bien éclairée, occupée par une immense table recouverte de plats débordants de victuailles. Devant la table, une chaise, une seule, face à une assiette, une seule, accompagnée d’un verre, d’un couteau, d’une fourchette et d’une serviette, comme au restaurant. Il ne résiste pas, il s’assoit, se sert ici et là, avale goulument et s'octroie de longues rasades de vin. Une fois le gros de sa faim calmée, il prend la peine de savourer. Il se sent bien. Ce festin en fait remonter d’autres, des repas de fête, des noëls, des anniversaire, toute une convivialité chaude et bruyante. Il ne se souvenait même pas qu’il avait connu ça. Ces dernières années, il était devenu une épave, un être sans mémoire, aux souvenirs effilochés, ne se souciant que de l’instant.
La maison est toujours aussi silencieuse. Il quitte la pièce et pousse la porte de la suivante. C’est une chambre. Le grand lit tendu d’un tissu satiné bleu l’hypnotise. Il y a si longtemps qu’il n’a pas dormi dans un lit. Il s’allonge à même le couvre-lit et s’endort. C’est le soleil qui le tire du sommeil. Il s’étire voluptueusement. Au mur, la photo d’une plage bordée de végétation exotique. Le ressac vient chanter à ses oreilles. C’était il y a si longtemps, sa lune de miel quelque part sur une île, avec… comment s’appelait-elle ? Claudine, voilà. Séjour paradisiaque, nuits d’amour, journées de soleil.
Au fil des jours, il explore les pièces de la maison, elles sont innombrables. Dans chacune, un souvenir refait surface, du bonheur en vrac, sans chronologie, heures d’amitié, émerveillements d’enfance, voyages, soirées de convivialité, euphories de musique et de danse, plaisirs de faire plaisir. Tant de belles choses ! Et dire qu’il avait oublié tous ces épisodes d’une vie si riche. Alors qu’elle ait dérapé sur la fin, quelle importance ? D’ailleurs est-ce qu’elle a vraiment dérapé, il n’en est plus si sûr.
C’est la fin du jour, il s’est allongé sur le lit d’une nouvelle chambre, fatigué mais serein. Il sait qu’il vit ses dernières heures, les dernières d’une vie pleine et dense comme un fruit mûr. Il n’est pas tout seul, quelqu’un lui tient la main, épouse ? Enfant ? Ami ? Tout est fini, le néant l’accueille comme un berceau.
Nul n’a retrouvé trace du SDF. D’ailleurs il n’existait déjà plus pour personne. Sur la lande, rien à l’horizon, pas de maison bleue. Pourtant un jour ou l’autre, elle apparaitra aux yeux d’un vagabond en détresse, elle l’accueillera et lui donnera les souvenirs des moments heureux que sa pauvre vie ne lui a jamais accordés. Et qu’importe que les souvenirs soient vrais ou faux, du moment qu’ils enchantent la tête et l'âme ?
Dernière édition par tobermory le Ven 2 Juin - 9:44, édité 2 fois
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: A.La maison des souvenirs perdus
Une approche très originale de la maison bleue, qui accueillerait donc des SDF, des êtres en détresse pour un dernier tour de piste de souvenirs.
Il fallait y penser, tu l'as fait et très, très bien !
Il fallait y penser, tu l'as fait et très, très bien !
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: A.La maison des souvenirs perdus
Une maison bleue comme un sas entre la vie et l'au-delà et qui réveille les plus beaux souvenirs d'une vie pour quelqu'un qui va la quitter, c'est une riche idée !
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A.La maison des souvenirs perdus
Au début ton histoire rappelle un peu les contes comme la Belle et la Bête ou Boucle d'Or avec ces pièces vides, et c'est effectivement un conte plein de poésie et d'espoir qui émerge
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
Re: A.La maison des souvenirs perdus
Je n'ai pas de mots si ce n'est que j'ai été touchée par ton inspiration.
Triste et belle histoire à la fois.
Triste et belle histoire à la fois.
July_C- Kaléïd'habitué
- Humeur : qui vagabonde
Re: A.La maison des souvenirs perdus
On savoure chaque mot, chaque phrase et on laisse l'histoire se dérouler sans bruit, comme dans un songe. Je vois dans cette histoire, non pas de la chance pour cet indigent d'avoir trouver un refuge, mais plutôt un mirage, celui que le délire final provoque avec cet endormissement des sens et des réflexes quand tout à coup la mort vous prend par la main comme un bien être tant est lourde la peine au quotidien. Je ne dirai pas que c'est extrêmement bien écrit car je le dis à chaque fois ou presque et que cela n'apporte rien de plus.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A.La maison des souvenirs perdus
J'ai suivi ton vagabond dans toutes les pièces de la maison, assistant au réveil de ses souvenirs et à sa fin de vie apaisée. Tu nous laisses sur une note positive, puisque le rôle de la maison s'inscrit dans l'avenir. J'ai beaucoup aimé !
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
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