la longue marche
+9
Escandélia
Coumarine
catsoniou
Pati
Tornade
Nerwen
Amanda.
Admin
AlainX
13 participants
Page 1 sur 1
la longue marche
Il restera quoi quand tu seras arrivé au terme du voyage ? Crois-tu que quelqu'un tendra vers toi des bras ouverts ? Tu sais ce que tu as vécu. Tu sais ce qu'il en est. La marche dans les ténèbres, laborieuse, interminable, épuisante. Tout cela parce que là-bas, dans les hauteurs, tu as cru qu'il y aurait une lumière. Beaucoup ont préféré demeurer dans l'ombre, mener une vie de taupe, parce que l'espoir et une attraction dangereuse. Chacun a bien vu dans le passé à quel point l'espérance était toujours déçue. Mieux vaut s'enfouir dans le sable profondément. Mieux vaut rejoindre la ténèbre qui ne déçoit pas, puisqu'elle n'a rien à proposer. Et que nous-mêmes nous n'attendons plus rien.
Mais toi, alors que nous étions bêtement à te suivre, tu ne cessais de répéter :
— « L’obscurité ne peut chasser l'obscurité, seule la lumière le peut ».
La lumière ? Mais quelle lumière ? Cette autre forme de l'obscurité, qui n'est jamais qu'une ombre fadasse ? Et puis, pourquoi chasser l'obscurité ? On n'est pas bien ici, dans la ténèbre, la non vie, ce plaisir de se boucher les yeux, puis de les rouvrir, pour constater que tout n'est qu'obscurité, que rien n'est clair, ni personne ? Pas même toi. Pas même moi. Ici nous avons tout ce qui nous permet de justifier notre immobilisme, de nous repaître du non-sens, nous gaver du vide, nous vautrer dans ce coton obscur et protecteur et attendre la mort si confortablement.
Franchement, que peut-on espérer de mieux ?
Pourquoi sommes-nous quelques fous à te suivre ? Tu nous répètes sans cesse que la lumière est là-bas, que tu l'as aperçue, qu'il faut te faire confiance. Tu promets la fin de l'obscurité et le bonheur du jour. Mais moi, je ne vois rien. Rien de rien. Les autres non plus. Nous sommes désormais dans la totale cécité, tu le sais bien.
Et puis, il y eut ce déchirement. Ce fut terrible. Du ciel tombât une lumière qui nous bombarda tous. Chacun en fut blessé, transpercé jusqu'au plus profond de l'âme. Une lumière aveuglante. C'était encore pire que la ténèbre. Dans la ténèbre, on ne voit rien, dans l'extrême lumière on devient aveugle.
Est-ce que c'était cela le châtiment ? Est-ce que c'était cela la vengeance de n'avoir jamais désiré voir la lumière ?
Et toi, là-bas, avançant seul, les bras écartés, le pas léger, les yeux grands ouverts, tu fus tout à coup comme enveloppé. Tu te retournas vers nous.
— "Venez !"
Personne ne bougea.
Tout à coup la lumière me sembla moins agressive. Le grand éclair blanc ne me brûlait plus les yeux. J'ai aperçu ta silhouette toute blanche. Tu tournas le regard vers moi avec un grand sourire.
Peut-être que je me trompe, mais il m'a semblé que tu étais comme entouré par une sorte de bonheur.
J'ai fermé les yeux, comme pour tenter de m'imprégner de cette vision.
Quand je les ai réouverts. Il n'y avait plus rien.
Mais toi, alors que nous étions bêtement à te suivre, tu ne cessais de répéter :
— « L’obscurité ne peut chasser l'obscurité, seule la lumière le peut ».
La lumière ? Mais quelle lumière ? Cette autre forme de l'obscurité, qui n'est jamais qu'une ombre fadasse ? Et puis, pourquoi chasser l'obscurité ? On n'est pas bien ici, dans la ténèbre, la non vie, ce plaisir de se boucher les yeux, puis de les rouvrir, pour constater que tout n'est qu'obscurité, que rien n'est clair, ni personne ? Pas même toi. Pas même moi. Ici nous avons tout ce qui nous permet de justifier notre immobilisme, de nous repaître du non-sens, nous gaver du vide, nous vautrer dans ce coton obscur et protecteur et attendre la mort si confortablement.
Franchement, que peut-on espérer de mieux ?
Pourquoi sommes-nous quelques fous à te suivre ? Tu nous répètes sans cesse que la lumière est là-bas, que tu l'as aperçue, qu'il faut te faire confiance. Tu promets la fin de l'obscurité et le bonheur du jour. Mais moi, je ne vois rien. Rien de rien. Les autres non plus. Nous sommes désormais dans la totale cécité, tu le sais bien.
*
Et puis, il y eut ce déchirement. Ce fut terrible. Du ciel tombât une lumière qui nous bombarda tous. Chacun en fut blessé, transpercé jusqu'au plus profond de l'âme. Une lumière aveuglante. C'était encore pire que la ténèbre. Dans la ténèbre, on ne voit rien, dans l'extrême lumière on devient aveugle.
Est-ce que c'était cela le châtiment ? Est-ce que c'était cela la vengeance de n'avoir jamais désiré voir la lumière ?
Et toi, là-bas, avançant seul, les bras écartés, le pas léger, les yeux grands ouverts, tu fus tout à coup comme enveloppé. Tu te retournas vers nous.
— "Venez !"
Personne ne bougea.
Tout à coup la lumière me sembla moins agressive. Le grand éclair blanc ne me brûlait plus les yeux. J'ai aperçu ta silhouette toute blanche. Tu tournas le regard vers moi avec un grand sourire.
Peut-être que je me trompe, mais il m'a semblé que tu étais comme entouré par une sorte de bonheur.
J'ai fermé les yeux, comme pour tenter de m'imprégner de cette vision.
Quand je les ai réouverts. Il n'y avait plus rien.
*
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: la longue marche
Un très très très beau texte qui peut s'interpréter de plein de façons différentes, ce qui le rend encore plus intéressant.
Ta chute est à ... tomber !!!!!!!!!!!!!!
Je la remets ici, rien que pour le plaisir:
Ta chute est à ... tomber !!!!!!!!!!!!!!
Je la remets ici, rien que pour le plaisir:
Alainx a écrit:J'ai fermé les yeux, comme pour tenter de m'imprégner de cette vision.
Quand je les ai réouverts. Il n'y avait plus rien.
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: la longue marche
Je lis et relis ce texte bouleversant...
Je ne sais quoi te dire, tellement c'est superbement écrit et je me le garde, à lire et à relire.
La fin m'épouvante, j'arrête là
Je ne sais quoi te dire, tellement c'est superbement écrit et je me le garde, à lire et à relire.
La fin m'épouvante, j'arrête là
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: la longue marche
C'est en effet un remarquable texte aux multiples lectures, chacun pouvant identifier (ou non) la silhouette blanche du Guide. Mais le réveil est brutal après le bref moment d'espoir suggéré par la phrase: "Peut-être que je me trompe, mais il m'a semblé que tu étais comme entouré par une sorte de bonheur."
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: la longue marche
Waouh ! Du Grand AlainX (oserais-je ajouter "comme d'hab !" ?)
Tornade- Kaléïd'habitué
- Humeur : En phase ascendante
Re: la longue marche
c'est la version alainx qui me touche le plus. quand ta plume nous emporte dans un monde sans autre frontiere que celle qu'on se fixe soi-même.
un tres beau texte, oui. merci pour le partage
un tres beau texte, oui. merci pour le partage
Pati- Kaléïd'habitué
- Humeur : mouvante
Re: la longue marche
On peut lire la désespérance mais aussi l'espoir fut-il fugace et disparaissant comme un mirage.
J'opte pour l'espoir avec l'idée de jouer un rôle dans la marche en avant vers une lumière improbable.
Des lendemains qui chantent ? Si ce n'est pas sûr, c'est quand même peut-être !
J'opte pour l'espoir avec l'idée de jouer un rôle dans la marche en avant vers une lumière improbable.
Des lendemains qui chantent ? Si ce n'est pas sûr, c'est quand même peut-être !
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: la longue marche
Nerwen a écrit:C'est en effet un remarquable texte aux multiples lectures, chacun pouvant identifier (ou non) la silhouette blanche du Guide. Mais le réveil est brutal après le bref moment d'espoir suggéré par la phrase: "Peut-être que je me trompe, mais il m'a semblé que tu étais comme entouré par une sorte de bonheur."
Texte au multiples lectures? oui !
La fin est, à mes yeux, une "fin ouverte". Chacun peut l'interpréter ou imaginer la suite...
Elle peut être "négative" (réveil brutal que tu évoques - Où Amanda disant : La fin m'épouvante, j'arrête là" - etc...) - La fin peut-être "positive"... par ex : et si le personnage qui parle était devenu lui-même lumière ? Et d'une certaine manière devenant "Guide" à son tour ?
Ou autre chose.... selon ce que l'on a envie d'inventer ou de se projeter...
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: la longue marche
j'ai lu hier ton beau texte, Alain, et je l'ai trouvé sombre. D'abord.
puis ce matin encore et me suis demandé ce que ce texte avait à ME dire, indépendamment de TOI, l'auteur
Le guide tout de blanc vêtu m'a attirée
Mais je n'aime pas qu'au réveil, il ait disparu.
Au risque de passer ringarde, j'ai pensé à Jésus, qui Lui aussi disparaît, mais qui, pour ceux qui croient, reste présent, plus que jamais...
Alors j'ai trouvé ton texte difficile (on préfère que le Guide reste présent à nos côtés, qu'on puisse le voir, le toucher, le "posséder", qu'il soit bien concret
donc texte difficile mais ouvert vers lumière...
comme sur la photo
Mais c'est une autre lumière que celle qui atteint le nerf optique
Une lumière intérieure
puis ce matin encore et me suis demandé ce que ce texte avait à ME dire, indépendamment de TOI, l'auteur
Le guide tout de blanc vêtu m'a attirée
Mais je n'aime pas qu'au réveil, il ait disparu.
Au risque de passer ringarde, j'ai pensé à Jésus, qui Lui aussi disparaît, mais qui, pour ceux qui croient, reste présent, plus que jamais...
Alors j'ai trouvé ton texte difficile (on préfère que le Guide reste présent à nos côtés, qu'on puisse le voir, le toucher, le "posséder", qu'il soit bien concret
donc texte difficile mais ouvert vers lumière...
comme sur la photo
Mais c'est une autre lumière que celle qui atteint le nerf optique
Une lumière intérieure
Coumarine- Kaléïd'habitué
- Humeur : concentrée
Re: la longue marche
C'est un texte qui doit nous interpeller, même si chacun reste libre de son interprétation, j'y voie comme une lueur d'espoir, en particulier en la personne du guide dont tu parles. Chacun peut être guide, il faut seulement ne pas se tromper de "lumière ".
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: la longue marche
Je vois pas ce que cela aurait de ringad....Coumarine a écrit:Au risque de passer ringarde, j'ai pensé à Jésus, (...)
Où alors je le suis aussi, puisque je parle assez souvent de cette figure de l'Humanité sur mon blog "le Voyageur de l'Aube"...
Mes pensées n'étaient pas celles-là en écrivant, mais ce passage de ton commentaire me rappelle un texte de la Bible que j'aime particulièrement depuis toujours, parce qu'il m'évoques l'espérance humaine de ceux qui sont dans les ténèbres d'une vie difficile voire désespérée...
"Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur ceux qui habitaient le pays de l'ombre, une lumière a resplendi" (Isaïe)
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: la longue marche
AlainX a écrit:
Je vois pas ce que cela aurait de ringad....
Où alors je le suis aussi, puisque je parle assez souvent de cette figure de l'Humanité sur mon blog "le Voyageur de l'Aube"...
Mes pensées n'étaient pas celles-là en écrivant, mais ce passage de ton commentaire me rappelle un texte de la Bible que j'aime particulièrement depuis toujours, parce qu'il m'évoques l'espérance humaine de ceux qui sont dans les ténèbres d'une vie difficile voire désespérée...
"Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur ceux qui habitaient le pays de l'ombre, une lumière a resplendi" (Isaïe)
------
J'ajoute ceci : Pour moi le texte n'est pas « sombre ». En effet, malgré leur ironie, leurs doutes de réticences, ( dont le personnage principal se fait interprète), ce petit groupe suit celui que quelqu'un ici a appelé « guide ». Il faut croire qu'ils portent en eux quelque chose de valable dont ils n'ont pas conscience…
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: la longue marche
Sommes nous tous plus ou moins des aveugles ?Le Christ le guide annonce que les aveugles verront...
Verront quoi?
" Cela crève les yeux" dit-on à propos d'une vérité ou réalité évidente... Certains pourtant ne supportent pas cela. Oedipe s'est lui même, crevé les yeux tant la découverte d'une certaine vérité lui était insoutenable. Je comprends qu'on peut avoir peur de la lumière et que même parfois on choisit inconsciemment d'oublier ce qu'on a vu entendu ou vécu.
Merci pour ce beau texte Alain qui pose question qui mène on ne sait où ... qui mène où on veut...
Verront quoi?
" Cela crève les yeux" dit-on à propos d'une vérité ou réalité évidente... Certains pourtant ne supportent pas cela. Oedipe s'est lui même, crevé les yeux tant la découverte d'une certaine vérité lui était insoutenable. Je comprends qu'on peut avoir peur de la lumière et que même parfois on choisit inconsciemment d'oublier ce qu'on a vu entendu ou vécu.
Merci pour ce beau texte Alain qui pose question qui mène on ne sait où ... qui mène où on veut...
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: la longue marche
Un beau texte Alain... très allégorique et très poignant.
madeleinedeproust- Kaléïd'habitué
- Humeur : littéraire
Re: la longue marche
C'est un tres beau texte, sombre et empli d'espoir a la fois. J'aime cette fin qui reste ouverte.
Myriel- Kaléïd'habitué
- Humeur : Girouette
Re: la longue marche
Que rajouter? tout a été dit, je pense, sur ce magnifique texte.
trainmusical- Occupe le terrain
- Humeur : à vous de juger :-)
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|