A - Lettre à mes parents
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Admin
brigou
AAnne
Escandélia
July_C
9 participants
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A - Lettre à mes parents
Chers parents,
Il me faut bien commencer par vous. Vous qui êtes encore au Laos. Moi qui suis revenue avant vous. Vous qui continuez votre voyage dans ce pays d’Asie qui vous ressemble. Moi qui continue ma vie, loin de ma famille.
Oui, finalement, je me dis que je suis si bien loin de vous. Ce quotidien qui me sépare de vous me permet de mieux vous retrouver à chaque fois. Et bien que vous ayez du mal encore à comprendre mon refus de me rapprocher, ce voyage près de votre passé m’a réellement renforcée dans mon choix de vie.
Je sais que vous ne le comprendrez jamais. Mais ce n’est pas grave. J’ai appris tout au long de ma vie à me défaire de mes espoirs, de mes attentes. J’ai appris sans relâche à me battre pour me défaire du poids mortel et silencieux de notre histoire commune. J’ai appris à le faire… en m’éloignant géographiquement de vous. C’était vital, pour vous, pour moi.
Cela fait déjà 8 ans que je suis partie. J’avais 22 ans. Et depuis, nous nous sommes rapprochés, car je me suis détachée de votre pression, de vos manipulations, de votre égoïsme pour apprendre à vous aimer tels que vous êtes. Je vous aime, je n’ai pas de doute, malgré le miroir que vous me renvoyez, malgré tout ce que j’ai pu endurer à vos côtés. Je ne vous aime pas parce que vous êtes mes géniteurs. Je vous aime parce que vous êtes humains. Je vous aime pour vos souffrances, je vous aime pour vos failles, je vous aime malgré votre silence.
Je vous aime dans ma résignation également.
J’apprends encore et pour toujours à me détacher de mes attentes, de mes ressentis, de mes déceptions pour toujours continuer à vous regarder, à vous envisager tels que vous êtes.
Malgré ma tristesse ressentie à vos côtés au Laos ; malgré le fait qu’à la dernière minute vous avez préféré fuir notre projet de nous rencontrer dans votre histoire passée ; j’arrive aujourd’hui à me dire que ce n’était pas moi que vous fuyiez. D’une certaine façon, je sais que je vous fais peur à aller chercher et creuser dans vos fêlures, dans vos souffrances. Et bien que j’aie été déçue sur l’instant de vous voir me tourner le dos, j’ai compris que vous tourniez le dos à autre chose. Et cette autre chose, c’est moi qui l’ai amenée.
Face aux difficultés que je rencontre dans la relation à l’autre. Je me dis toujours que les choses viendront en temps voulu. Je sais également dans mon travail que je ne change pas les enfants qui souffrent. Ils évoluent, progressent, s’ouvrent à moi si moi-même je change mon comportement envers eux. Alors je n’ai de cesse de me dire que je cherche depuis toujours à vous comprendre. Cette tristesse m’appartient et je ne vous la ferai pas porter. J’attendrai le temps qu’il faudra, et même si ce temps ne venait pas, j’apprendrai à faire avec.
Je serais peut-être triste, peut-être déçue si cela se produisait, mais ce n’est pas grave. Grâce à vos silences, à vos fêlures, grâce à tout ce que je n’ai pas reçue auprès de vous, j’ai eu la chance d’avoir rencontré d’autres personnes, d’autres vies, d’autres histoires. Ce manque d’amour que j’ai si longtemps ressenti s’est transformé en quelque chose de merveilleux. J’ai appris à apprivoiser ma vie, à effleurer le bonheur.
Je vous attendrai toujours mais je ne reste pas sur place. Prenez le temps qu’il vous faut. Je serai toujours là.
Bien à vous,
Votre fille.
Il me faut bien commencer par vous. Vous qui êtes encore au Laos. Moi qui suis revenue avant vous. Vous qui continuez votre voyage dans ce pays d’Asie qui vous ressemble. Moi qui continue ma vie, loin de ma famille.
Oui, finalement, je me dis que je suis si bien loin de vous. Ce quotidien qui me sépare de vous me permet de mieux vous retrouver à chaque fois. Et bien que vous ayez du mal encore à comprendre mon refus de me rapprocher, ce voyage près de votre passé m’a réellement renforcée dans mon choix de vie.
Je sais que vous ne le comprendrez jamais. Mais ce n’est pas grave. J’ai appris tout au long de ma vie à me défaire de mes espoirs, de mes attentes. J’ai appris sans relâche à me battre pour me défaire du poids mortel et silencieux de notre histoire commune. J’ai appris à le faire… en m’éloignant géographiquement de vous. C’était vital, pour vous, pour moi.
Cela fait déjà 8 ans que je suis partie. J’avais 22 ans. Et depuis, nous nous sommes rapprochés, car je me suis détachée de votre pression, de vos manipulations, de votre égoïsme pour apprendre à vous aimer tels que vous êtes. Je vous aime, je n’ai pas de doute, malgré le miroir que vous me renvoyez, malgré tout ce que j’ai pu endurer à vos côtés. Je ne vous aime pas parce que vous êtes mes géniteurs. Je vous aime parce que vous êtes humains. Je vous aime pour vos souffrances, je vous aime pour vos failles, je vous aime malgré votre silence.
Je vous aime dans ma résignation également.
J’apprends encore et pour toujours à me détacher de mes attentes, de mes ressentis, de mes déceptions pour toujours continuer à vous regarder, à vous envisager tels que vous êtes.
Malgré ma tristesse ressentie à vos côtés au Laos ; malgré le fait qu’à la dernière minute vous avez préféré fuir notre projet de nous rencontrer dans votre histoire passée ; j’arrive aujourd’hui à me dire que ce n’était pas moi que vous fuyiez. D’une certaine façon, je sais que je vous fais peur à aller chercher et creuser dans vos fêlures, dans vos souffrances. Et bien que j’aie été déçue sur l’instant de vous voir me tourner le dos, j’ai compris que vous tourniez le dos à autre chose. Et cette autre chose, c’est moi qui l’ai amenée.
Face aux difficultés que je rencontre dans la relation à l’autre. Je me dis toujours que les choses viendront en temps voulu. Je sais également dans mon travail que je ne change pas les enfants qui souffrent. Ils évoluent, progressent, s’ouvrent à moi si moi-même je change mon comportement envers eux. Alors je n’ai de cesse de me dire que je cherche depuis toujours à vous comprendre. Cette tristesse m’appartient et je ne vous la ferai pas porter. J’attendrai le temps qu’il faudra, et même si ce temps ne venait pas, j’apprendrai à faire avec.
Je serais peut-être triste, peut-être déçue si cela se produisait, mais ce n’est pas grave. Grâce à vos silences, à vos fêlures, grâce à tout ce que je n’ai pas reçue auprès de vous, j’ai eu la chance d’avoir rencontré d’autres personnes, d’autres vies, d’autres histoires. Ce manque d’amour que j’ai si longtemps ressenti s’est transformé en quelque chose de merveilleux. J’ai appris à apprivoiser ma vie, à effleurer le bonheur.
Je vous attendrai toujours mais je ne reste pas sur place. Prenez le temps qu’il vous faut. Je serai toujours là.
Bien à vous,
Votre fille.
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Ce texte, est le premier (ou le deuxième s'il faut compter le texte d'intro) de mon triptyque marathonien. Je l'ai choisi parce que c'est une lettre qui me tient à cœur, car c'est celui que j'aime le plus et qui me rapproche toujours plus du silence de mes parents et de leur histoire personnelle que j'imagine, invente (aussi peut-être) avec le peu d'éléments en ma possession. Elle m'a permis, en posant les mots du cœur, de transformer ce silence qui me met tellement à distance de mon histoire familiale. Une lettre adressée mais qui ne sera jamais destinée :-) Des mots déposés pour pouvoir continuer à envisager les choses de façon à pouvoir être un peu plus décentré de moi.
July_C- Kaléïd'habitué
- Humeur : qui vagabonde
Re: A - Lettre à mes parents
Il est vrai que l'on a parfois besoin de se poser les mots devant les yeux pour mieux les cerner, mieux s'en imprégner. Cette lettre en fait partie sans doute. Puisse-t-elle trouver un aboutissement et ton histoire un élément concret à son déroulement. Je t'admire July, mais ça, je crois que tu l'avais compris.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A - Lettre à mes parents
Quelle belle lettre!!!
AAnne- Kaléïd'habitué
- Humeur : Bonne, la plupart du temps.
Re: A - Lettre à mes parents
C'est avec beaucoup d'émotions que j'ai lu ta lettre July !
brigou- Kaléïd'habitué
- Humeur : souvent bonne !!
Re: A - Lettre à mes parents
Je suis contente que tu aies choisi cette lettre pour mettre sùr la consigne. C'est le texte qui m'a le plus émue sùr le marathon.
J'espère qu'un jour tu pourras enfin échanger avec tes parents de façon satisfaisante pour vous tous
J'espère qu'un jour tu pourras enfin échanger avec tes parents de façon satisfaisante pour vous tous
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: A - Lettre à mes parents
Magnifique, comme sur le marathon.
Toujours ces émotions qui ressortent et qui sont si bien exprimées.
Leur enverras tu ?
Toujours ces émotions qui ressortent et qui sont si bien exprimées.
Leur enverras tu ?
Cara1234- Kaléïd'habitué
- Humeur : Badine
Re: A - Lettre à mes parents
L'Histoire de ce pays est si tourmentée qu'on imagine combien ont du s'en ressentir les relations familiales.
Ta lettre laisse entrevoir un peu tout cela, mais aussi la sensibilité qui est la tienne ... et aussi la forte personnalité !
Ta lettre laisse entrevoir un peu tout cela, mais aussi la sensibilité qui est la tienne ... et aussi la forte personnalité !
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A - Lettre à mes parents
Tellement touchantes, les blessures d'enfant (non pas seulement d'enfance), quand elles sont posées ainsi, dans la sincérité d'un questionnement si profond. Vraiment, c'est une lettre pleine du mystère de l'amour qui se tisse en famille. Merci beaucoup de l'avoir partagée, cette lettre écrire par le coeur.
Invité- Invité
Re: A - Lettre à mes parents
Une lettre d'une grande intimité où chaque mot posé, avec beaucoup de tendresse, te permet de te construire. Sans rage ni rancune, avec sagesse et sérénité, comme si le temps avait mûri tes pensées et t'avait donné le juste ton pour les formuler.
virgul- Kaléïd'habitué
- Humeur : optimiste
Re: A - Lettre à mes parents
Une très, très belle lettre pleine de respect, de tendresse qui dit le manque et la souffrance qui sont tiens, de par cette histoire familiale; tes parents ne peuvent sans doute pas aborder plus leur histoire dans ce pays et peu à peu tu l'acceptes, c'est beau à voir, à lire. Ton texte est d'une grande sagesse en effet et il est magistralement écrit. Il faut que j'aille lire tout ton marathon, en tout cas, comme tu me l'as dit, te lire ainsi me rapproche un peu plus de toi...
plumentete- Kaléïd'habitué
- Humeur : heureuse attentive
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