A - Vacances de rêve
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Cara1234
catsoniou
tobermory
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A - Vacances de rêve
Les vacances avaient pourtant bien commencé. La vue de cet étrange véhicule m’avait mis en joie. Imaginez un sidecar dont l’habitacle du passager n’est autre qu’une haute cage métallique. Sans doute un mode de transport local, comme ailleurs le pousse-pousse. Très pittoresque. A peine débarqué de l’aéroport j’étais en plein exotisme. Quel pays extraordinaire !
Vous je ne sais pas, mais moi qui suis nul en géographie, j’ignorais jusqu’à l’existence de la Listannie avant que mon pote Bruno m’en parle à son retour de vacances. Drôlement enthousiaste, le Bruno. Je me disais qu’il devait en rajouter un brin. Passe encore pour les paysages paradisiaques et la bouffe à tomber, mais ce qui m’étonnait surtout c’étaient les filles. Parce que Bruno d’habitude c’est pas le genre de type qui les fait craquer. Eh bien là-bas, il n’avait qu’à choisir et se servir. Et attention, c’était pas pour le fric, juste qu’elles étaient folles des français. Devant mon incrédulité, il m’a montré les photos. Il s’était fait un paquet de selfies. Lui avec une brune aux allures de mannequin, lui avec une blonde pulpeuse et encore d’autres, dans des genres différents, mais rien que des filles canon. Et qui le regardaient avec la même adoration que s’il avait été Johnny Deep ou Gorges clooney.
Et voilà pourquoi en ce soir de juillet je me trouvais devant la l’aéroport de la capitale listanienne avec ce type en uniforme et casquette qui m’invitait à entrer dans une cage à roulettes pour me conduire au Grand Hôtel des voyageurs où j’avais réservé. Une fois que je fus à l’intérieur, il referma la porte à grand fracas de serrure et cadenas.
- Pour votre sécurité marmonna-t-il.
Debout, agrippé aux barreaux, secoué par les cahots de la route on ne peut pas dire que c’était le confort idéal, mais je m’imaginais déjà racontant l’anecdote une fois de retour en France. Les vacances, c’est ça aussi, quelque chose à raconter, des photos à montrer, des souvenirs à engranger.
Après trois quarts d’heure de trajet fatigant dans un paysage urbain sans intérêt, nous arrivons enfin à l’hôtel. Façade de béton lépreuse et fenêtres déglinguées. Mon chauffeur ouvre la cage, me passe des menottes, « pour votre sécurité ! » et me pousse jusqu’à une chambre qui en guise du « grand luxe » promis par le prospectus, a tout de la cellule de prison bas de gamme. Avant que j’aie pu demander des explications, l’homme a brutalement refermé et verrouillé la porte.
Je crève de faim, ça tombe bien, le repas est servi : un brouet infâme, dont j’avale quand même quelques cuillerées pour tenir le coup. Inutile de préciser que je passe une mauvaise nuit et que j’ai hâte d’arriver au matin. Quel que soit le but de cette mascarade, mon geôlier est un employé de l’hôtel et je n’ai réservé que pour une nuit. Forcément, demain il va me lâcher les basques et je serai libre. Erreur, le lendemain il me fait réintégrer ma cage roulante et m’apprend qu’il sera mon chauffeur et mon guide pour tout le circuit que j’ai payé. « Sans supplément » précise-t-il. Et il ajoute « pour votre sécurité ! » Un refrain que je commence à connaitre.
Et voilà me voilà parti pour trois semaines à travers le pays toujours avec mon précieux guide-chauffeur-geôlier. Il me conduit de ville en ville, me faisant admirer des barres d’immeubles grises et tristes baptisées « La cité radieuse », « La cité des travailleurs heureux », « le quartier des mille fleurs » et autres appellations aussi ronflantes qu’abusives.
Entre les villes, rien d’étonnant, il y a de la campagne. Quand j’aperçois un village aux toits biscornus ou une vallée verdoyante, je supplie mon guide de faire un détour, mais c’est hors de question, « pour votre séc.. » Bon ça va, j’ai compris. Ils sont vraiment très sécuritaires ici. Pas question non plus de goûter aux spécialités culinaires dont les fragrances enchanteresses parviennent parfois jusqu’à mes narines. Les filles, n’en parlons pas. Jolies certes, mais vu ma situation, impossible de les aborder. D’ailleurs je me demande où est cet engouement pour les français vanté par Bruno. Quand elles me voient, elles ricanent en me montrant du doigt avec force mimiques méprisantes.
Mon cicérone m’a confisqué mon appareil photo depuis longtemps (sécurité…) et s’en sert abondamment pour faire des clichés des filles, mais aussi de moi-même. Il me demande de sourire, d’avoir l’air heureux. Au début, je m’exécutais, espérant l’amadouer et assouplir ma condition. Mais comme ça ne changeait rien, j’ai fini par sombrer dans le mutisme et l’abattement.Pour le soir, la routine est maintenant bien établie : on passe de la cage nomade à la cellule du prisonnier sédentaire. Je m’accroche à l’idée que la fin du séjour approche, en priant pour que les raisons de sécurité ne me condamnent pas à rester en l’état.
Ouf, nous voilà de retour à l’aéroport et mon guide me libère. C’est à peine si j’y crois. Il me rend mon appareil et me tend une grosse enveloppe : des photos, des photos de vacances avec moi en personnage principal. Moi dans un hôtel luxueux, moi devant des paysages paradisiaques ou attablé face à une profusion de plats qui mettent l’eau à la bouche. Moi aussi avec la brune, la blonde et autres filles canon au regard énamouré. Des photos trafiquées par ordinateur bien sûr.
Dans l’avion, je passe en revue ces dizaines de clichés, je m’y plonge, je m’y perds. Le cauchemar répétitif du périple en cage s’efface peu à peu. Rêve, réalité ? Mon voisin, juste en transit dans le pays, n’a pas pu s’empêcher de jeter un œil. Il me lance :
- Ben dites-donc on dirait que vous ne vous êtes pas embêté ici. En vacances ?
- En vacances, oui. Extraordinaire cette destination, je vous la conseille !
Vous je ne sais pas, mais moi qui suis nul en géographie, j’ignorais jusqu’à l’existence de la Listannie avant que mon pote Bruno m’en parle à son retour de vacances. Drôlement enthousiaste, le Bruno. Je me disais qu’il devait en rajouter un brin. Passe encore pour les paysages paradisiaques et la bouffe à tomber, mais ce qui m’étonnait surtout c’étaient les filles. Parce que Bruno d’habitude c’est pas le genre de type qui les fait craquer. Eh bien là-bas, il n’avait qu’à choisir et se servir. Et attention, c’était pas pour le fric, juste qu’elles étaient folles des français. Devant mon incrédulité, il m’a montré les photos. Il s’était fait un paquet de selfies. Lui avec une brune aux allures de mannequin, lui avec une blonde pulpeuse et encore d’autres, dans des genres différents, mais rien que des filles canon. Et qui le regardaient avec la même adoration que s’il avait été Johnny Deep ou Gorges clooney.
Et voilà pourquoi en ce soir de juillet je me trouvais devant la l’aéroport de la capitale listanienne avec ce type en uniforme et casquette qui m’invitait à entrer dans une cage à roulettes pour me conduire au Grand Hôtel des voyageurs où j’avais réservé. Une fois que je fus à l’intérieur, il referma la porte à grand fracas de serrure et cadenas.
- Pour votre sécurité marmonna-t-il.
Debout, agrippé aux barreaux, secoué par les cahots de la route on ne peut pas dire que c’était le confort idéal, mais je m’imaginais déjà racontant l’anecdote une fois de retour en France. Les vacances, c’est ça aussi, quelque chose à raconter, des photos à montrer, des souvenirs à engranger.
Après trois quarts d’heure de trajet fatigant dans un paysage urbain sans intérêt, nous arrivons enfin à l’hôtel. Façade de béton lépreuse et fenêtres déglinguées. Mon chauffeur ouvre la cage, me passe des menottes, « pour votre sécurité ! » et me pousse jusqu’à une chambre qui en guise du « grand luxe » promis par le prospectus, a tout de la cellule de prison bas de gamme. Avant que j’aie pu demander des explications, l’homme a brutalement refermé et verrouillé la porte.
Je crève de faim, ça tombe bien, le repas est servi : un brouet infâme, dont j’avale quand même quelques cuillerées pour tenir le coup. Inutile de préciser que je passe une mauvaise nuit et que j’ai hâte d’arriver au matin. Quel que soit le but de cette mascarade, mon geôlier est un employé de l’hôtel et je n’ai réservé que pour une nuit. Forcément, demain il va me lâcher les basques et je serai libre. Erreur, le lendemain il me fait réintégrer ma cage roulante et m’apprend qu’il sera mon chauffeur et mon guide pour tout le circuit que j’ai payé. « Sans supplément » précise-t-il. Et il ajoute « pour votre sécurité ! » Un refrain que je commence à connaitre.
Et voilà me voilà parti pour trois semaines à travers le pays toujours avec mon précieux guide-chauffeur-geôlier. Il me conduit de ville en ville, me faisant admirer des barres d’immeubles grises et tristes baptisées « La cité radieuse », « La cité des travailleurs heureux », « le quartier des mille fleurs » et autres appellations aussi ronflantes qu’abusives.
Entre les villes, rien d’étonnant, il y a de la campagne. Quand j’aperçois un village aux toits biscornus ou une vallée verdoyante, je supplie mon guide de faire un détour, mais c’est hors de question, « pour votre séc.. » Bon ça va, j’ai compris. Ils sont vraiment très sécuritaires ici. Pas question non plus de goûter aux spécialités culinaires dont les fragrances enchanteresses parviennent parfois jusqu’à mes narines. Les filles, n’en parlons pas. Jolies certes, mais vu ma situation, impossible de les aborder. D’ailleurs je me demande où est cet engouement pour les français vanté par Bruno. Quand elles me voient, elles ricanent en me montrant du doigt avec force mimiques méprisantes.
Mon cicérone m’a confisqué mon appareil photo depuis longtemps (sécurité…) et s’en sert abondamment pour faire des clichés des filles, mais aussi de moi-même. Il me demande de sourire, d’avoir l’air heureux. Au début, je m’exécutais, espérant l’amadouer et assouplir ma condition. Mais comme ça ne changeait rien, j’ai fini par sombrer dans le mutisme et l’abattement.Pour le soir, la routine est maintenant bien établie : on passe de la cage nomade à la cellule du prisonnier sédentaire. Je m’accroche à l’idée que la fin du séjour approche, en priant pour que les raisons de sécurité ne me condamnent pas à rester en l’état.
Ouf, nous voilà de retour à l’aéroport et mon guide me libère. C’est à peine si j’y crois. Il me rend mon appareil et me tend une grosse enveloppe : des photos, des photos de vacances avec moi en personnage principal. Moi dans un hôtel luxueux, moi devant des paysages paradisiaques ou attablé face à une profusion de plats qui mettent l’eau à la bouche. Moi aussi avec la brune, la blonde et autres filles canon au regard énamouré. Des photos trafiquées par ordinateur bien sûr.
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Dans l’avion, je passe en revue ces dizaines de clichés, je m’y plonge, je m’y perds. Le cauchemar répétitif du périple en cage s’efface peu à peu. Rêve, réalité ? Mon voisin, juste en transit dans le pays, n’a pas pu s’empêcher de jeter un œil. Il me lance :
- Ben dites-donc on dirait que vous ne vous êtes pas embêté ici. En vacances ?
- En vacances, oui. Extraordinaire cette destination, je vous la conseille !
Dernière édition par tobermory le Dim 4 Sep - 23:52, édité 2 fois
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: A - Vacances de rêve
Comme quoi, faut se méfier des pubs pour voyages organisés ...
Excellente illustration de la "cellule mobile " !
Excellente illustration de la "cellule mobile " !
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A - Vacances de rêve
Excellent, si ce n'est pas de la désinformation ça ! On va se méfier des photos de vacances aux Seychelles maintenant
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
Re: A - Vacances de rêve
Au début je me suis dit quelle bonne idée d'avoir pensé à un véhicule touristique avec chauffeur !
Et puis le voyage tourne vite au cauchemar ! Tu écris bien l'ambiance !
Et puis le voyage tourne vite au cauchemar ! Tu écris bien l'ambiance !
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A - Vacances de rêve
Ben dis donc le Bruno, il avait beaucoup envie de faire vivre son voyage "paradisiaque" à d'autres !!!!
Une idée "exquise"...... hem! Trois semaines, c'est très, très long!
Une idée "exquise"...... hem! Trois semaines, c'est très, très long!
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
Re: A - Vacances de rêve
Donc on va être vigilent si tu nous recommandse un séjour quelque part. Pour les prochaines, je crois que je vais continuer avec mon puy de Sancy !
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
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