A. l'enfant du 11 mai 68
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A. l'enfant du 11 mai 68
L’enfant de mai 68
Mon ventre est gros de neuf mois d’attente et d’impatience. Mon mari a fait ce qu’il faut pour cela et j’en suis bien contente ; Je veux un bébé ,garçon de préférence, à moi, mais je n’ai pas prévu ce ventre si tendu et ces seins débordant de tous mes sous et survêtements .
Mon ventre est au bord d’un éclatement, d’une éruption enfantine. J’ai peur et j’ai mal.
Mon ventre est au centre d’une révolution à vie ou à mort ( je ne sais plus au juste) qui se fait hurlante ,qui en appelle à la délivrance et me plie en deux, suppliante devant un médecin et un dieu qui m’oblige à accoucher dans la douleur. C’est le prix à payer depuis la nuit des temps pour la faute d’une inconnue d’Eve et d’Adam .Eh bien merci.
Si j’avais été à leurs places, je ne l’aurais pas croquée, moi, cette pomme fatale et je n’en serais pas là, ici, maintenant, à travailler à la sueur de mon front et de mes larmes pour un accouchement.
Une religieuse s’est assise à coté de moi, un chapelet enlacé dans la main, et tandis que je me bats avec mes entrailles, elle récite à haute voix des Ave et des Pater tout en commentant mes gémissements : « Il faut souffrir pour être mère. Toutes les femmes passent par là, soyez sage et courageuse car ceci n’est qu’un tout petit début, prévient –elle, vous n’en êtes qu’à une pièce d’un franc ! »
Parler d’argent et prier Dieu en ce moment et en ce lieu est indécent alors que mon sexe est tondu et grand ouvert sur l’inconnu. Je m’énerve. La religieuse est renvoyée à sa chapelle ardente et moi sur mon lit d’hôpital.
Dehors, parents et amis se préparent .Ils sont aux aguets de la moindre nouvelle annonciatrice de la naissance prochaine .La date fixée est largement dépassée. Ils attendent les premières contractions, la descente des eaux, le degré d’ouverture, la sonnette d’alarme, le coup de téléphone, les bulles du champagne, la couleur des yeux et le sexe de l’enfant.
Au-dedans, l’enfant nage dans un bonheur sûr, paresseux et tranquille .Il profite de ces dernières heures souterraines silencieuses. Il n’est pas pressé d’aller voir ailleurs : il se sent si bien en moi.
-« Va falloir activer le travail, provoquer l’événement » : dit le médecin impatient en regardant les heures se suivre et se ressembler si lentement.
La suite, je ne m’en souviens pas : je n’étais pas là, j’étais partie me réfugier dans les bras d’une bonne Morphée.
La surprise, c’est un réveil brusque au milieu de la nuit : un bébé pleure doucement dans un berceau à coté de moi.
-« C’est un garçon, Madame, toutes mes félicitations. »
Le jour se lève, il est 5 heures en ce 11 mai 1968, la Belgique s’éveille .
Et moi, dans mon lit, je berce le nouveau né, mon bébé.
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Mon ventre est gros de neuf mois d’attente et d’impatience. Mon mari a fait ce qu’il faut pour cela et j’en suis bien contente ; Je veux un bébé ,garçon de préférence, à moi, mais je n’ai pas prévu ce ventre si tendu et ces seins débordant de tous mes sous et survêtements .
Mon ventre est au bord d’un éclatement, d’une éruption enfantine. J’ai peur et j’ai mal.
Mon ventre est au centre d’une révolution à vie ou à mort ( je ne sais plus au juste) qui se fait hurlante ,qui en appelle à la délivrance et me plie en deux, suppliante devant un médecin et un dieu qui m’oblige à accoucher dans la douleur. C’est le prix à payer depuis la nuit des temps pour la faute d’une inconnue d’Eve et d’Adam .Eh bien merci.
Si j’avais été à leurs places, je ne l’aurais pas croquée, moi, cette pomme fatale et je n’en serais pas là, ici, maintenant, à travailler à la sueur de mon front et de mes larmes pour un accouchement.
Une religieuse s’est assise à coté de moi, un chapelet enlacé dans la main, et tandis que je me bats avec mes entrailles, elle récite à haute voix des Ave et des Pater tout en commentant mes gémissements : « Il faut souffrir pour être mère. Toutes les femmes passent par là, soyez sage et courageuse car ceci n’est qu’un tout petit début, prévient –elle, vous n’en êtes qu’à une pièce d’un franc ! »
Parler d’argent et prier Dieu en ce moment et en ce lieu est indécent alors que mon sexe est tondu et grand ouvert sur l’inconnu. Je m’énerve. La religieuse est renvoyée à sa chapelle ardente et moi sur mon lit d’hôpital.
Dehors, parents et amis se préparent .Ils sont aux aguets de la moindre nouvelle annonciatrice de la naissance prochaine .La date fixée est largement dépassée. Ils attendent les premières contractions, la descente des eaux, le degré d’ouverture, la sonnette d’alarme, le coup de téléphone, les bulles du champagne, la couleur des yeux et le sexe de l’enfant.
Au-dedans, l’enfant nage dans un bonheur sûr, paresseux et tranquille .Il profite de ces dernières heures souterraines silencieuses. Il n’est pas pressé d’aller voir ailleurs : il se sent si bien en moi.
-« Va falloir activer le travail, provoquer l’événement » : dit le médecin impatient en regardant les heures se suivre et se ressembler si lentement.
La suite, je ne m’en souviens pas : je n’étais pas là, j’étais partie me réfugier dans les bras d’une bonne Morphée.
La surprise, c’est un réveil brusque au milieu de la nuit : un bébé pleure doucement dans un berceau à coté de moi.
-« C’est un garçon, Madame, toutes mes félicitations. »
Le jour se lève, il est 5 heures en ce 11 mai 1968, la Belgique s’éveille .
Et moi, dans mon lit, je berce le nouveau né, mon bébé.
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Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A. l'enfant du 11 mai 68
J'ai déjà un jour mis sur kalé ce texte mais je ne sais plus quand ... je ne pourrais en écrire un autre.
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A. l'enfant du 11 mai 68
J'ai l'impression que ce texte, Charlotte, tu l'as écrit avec ton ventre. Avec tes mots et une façon bien personnelle de raconter ce moment qui révolutionne une vie.
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A. l'enfant du 11 mai 68
Ainsi, nous avons chacune un fils cuvéé 68! Très belle année, on prépare la fête...
Que de bons souvenirs!
Que de bons souvenirs!
Zéphyrine- Modératrice écriture libre
- Humeur : Méditerranéenne
Re: A. l'enfant du 11 mai 68
Superbe texte tout simplement !
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
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