A - Frustration soixante-huitarde

**Martine27** Ven 11 Mai - 16:02

Mai 68, à la différence de Souchon je n'ai pas 10 ans, mais 11. J'habite à Clamart une ville des Hauts-de-Seine et pour ceux qui ont déjà eu l'occasion de lire mes légendes familiales, je vis avec mes parents dans une caserne de pompiers.

Mon père ayant accompli ses 20 ans de services, nous n'allons pas tarder à déménager pour la Normandie, c'est prévu pour le mois de juin.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que nous aurons connu un départ de la capitale en forme de feux d'artifices.

Clamart-le Quartier Latin c'est environ une dizaine de kilomètres à vol d'oiseau. Il me semble me remémorer que nous entendions les déflagrations des cocktails molotov, mais peut-être n'est-ce qu'un souvenir que j'ai fabriqué après coup et en entendant les conversations entre adultes.

Une chose est sûre c'est qu'à la caserne ça ne chômait pas, les sorties vers les points chauds c'était plusieurs fois par jour et les pompiers se trouvaient, ironie du sort, pris entre deux feux si on peut dire, entre manifestants et forces de l'ordre. Etant eux-mêmes des militaires je pense que la situation ne devait pas être facile à gérer, à la fois au service du pays et de la population.

Mais pour tout dire je me fichais du tiers comme du quart du remue-ménage généré par les adultes.

Non, ce qui m'enquiquinais grave c'était le voyage de fin d'année scolaire. Dans l'école primaire où j'étais, relativement petite si je me souviens bien deux classes de chaque niveau il me semble, si nous participions toutes (école de filles uniquement, autre temps, autre mœurs) aux sorties scolaires (je me souviens notamment de Versailles et du Louvres), les grands voyages type classe de neige et classe verte ne concernaient qu'une seule classe. Et manque de chance je n'avais jamais été dans la bonne.

Mais cette année là, c'était le jackpot ! Notre classe devait partir, excusez du peu, à Venise !!! Je ne vous dis pas le rêve !

Hélas, trois fois hélas, voilà que « les grands » jouaient à gugusse et mettaient des bâtons dans les roues du train que nous devions prendre. Arrggghh !

Notre directrice décida donc de changer la destination, l'Italie se transformait en Normandie avec notamment le Château de Robert le Diable et le Pont de Tancarville. Bon bof, d'autant plus bof que j'allais y vivre en Normandie, quand vous jouez de malchance c'est jusqu'au bout !

Malheureusement, après s'être attaqué à notre train, voilà que « les grands » s'en prenaient aussi aux bus. Et de sortie de fin d'année il n'y eut point ! J'en suis encore fort marrie (même si mes parents me firent visiter tous les endroits que notre bande de filles auraient dû écumer).

Alors autant le dire pour moi Mai 68 reste un grand moment de frustration enfantine et même encore maintenant certaines actions syndicales ont tendance à m'agacer un tantinet.

**catsoniou** Ven 11 Mai - 17:15

La différence des grèves de 68 et celles d'aujourd'hui, c'est qu'il y avait des grévistes dans tous les corps de métiers et même dans des petites entreprises, et même la télé et la radio participaient. Sûr que les pompiers ne savaient pas toujours dans quel camps ils étaient ...

M'enfin quand même rater Venise, c'était dommage !

Leçon à tirer de cette frustration : dur, dur de contenter tout le monde ! Caliméro

**Martine27** Ven 11 Mai - 18:45

Eh oui, c'est pô juste ! Pour ce qui est des pompiers ils leur arrivaient de s'interposer entre les deux camps, pas simple d'être assis entre deux chaises

Kz Ven 11 Mai - 19:16

"Mais pour tout dire je me fichais du tiers comme du quart du remue-ménage généré par les adultes."

J'ai adoré ! Un texte qu'on lit avec plaisir et tu sais entretenir l'intérêt du lecteur. clap

**Myrte** Sam 12 Mai - 7:09

Voila un texte authentique et bien écrit, avec une pointe d'humour qui ne gâte rien et que j'ai lu avec un réel plaisir !

**Martine27** Sam 12 Mai - 10:28

Merci à vous deux. Comme quoi les enfants voient les grands évènements de l'histoire d'un point de vue un brin décalé.

**Nerwen** Sam 12 Mai - 11:46

Il est sûr que les enfants n'ont pas forcément apprécié les chamboulements de mai 68. Venise, c'était quelque chose, quand même ! Bravo pour ton texte ! Bravo

**Martine27** Sam 12 Mai - 14:41

Et en prime à la rentrée scolaire il y a eu "les maths modernes" beurk !!!!

**Zéphyrine** Sam 12 Mai - 17:01

Pauvre Martine! Être privée de Venise...
Sais tu que j'ai du attendre 50 ans de mariage c'est à dire cette année pour voir cette belle ville?

**Martine27** Dim 13 Mai - 14:30

J'espère que tu en as bien profité, très beau cadeau de noces !

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