A.Mathilde
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FrançoiseB
Ataraxie
Sherkane
7 participants
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A.Mathilde
Mathilde a 70 ans. Ancienne institutrice et veuve depuis une dizaine d’années, elle se retrouve bien seule dans son petit pavillon isérois. Ses deux enfants travaillent à l’étranger. L’un comme serveur au Canada, l’autre comme informaticien dans la Silicon Valley. Ils ne reviennent en France qu’une seule fois par an et Mathilde regrette de ne pas voir grandir ses petits-enfants.
Mathilde se languit. Elle qui a toujours été de nature battante et dynamique s’ennuie maintenant. Parfois elle pense avec nostalgie au temps où elle se battait pour différentes causes. Cela a débuté en mai 68. Mathilde s’est engagée à corps perdu dans les manifestations avec toute la fougue de sa jeunesse. Elle en avait aimé l’enthousiasme, l’espérance, la liberté. C’est à ce moment-là qu’elle a rencontré Bernard son futur mari. Mai 68 fini, ils ont tous les deux continué à s’investir dans des combats professionnels.
Maintenant veuve, à la retraite, marchant difficilement avec une canne, elle se retrouve un peu cloitrée dans sa maison. Avide néanmoins de contacts, elle s’est mise aux réseaux sociaux et suit l’actualité sociale avec acuité.
L’appel des gilets jaunes l’interpelle, la galvanise. Dans ce mouvement naissant il lui semble retrouver la même liesse populaire qu’en mai 68. Le peuple qui veut faire entendre sa voix. Le peuple qui défie l’état.
Même si elle dispose de revenus corrects et qu’elle ne possède plus de voiture depuis longtemps, elle adhère aux revendications des gilets jaunes. Comprenant que ces revendications sont bien plus profondes que la simple hausse du carburant.
C’est ainsi que le 17 novembre 2018 Mathilde se retrouve au milieu de dizaines d’autres gilets jaunes à bloquer un rond-point stratégique d’entrée d’autoroute.
Mathilde est heureuse. Elle retrouve une atmosphère bon enfant fait de plaisir, de partage et d’échange ! Les clivages tombent, les générations se côtoient. Avec tendresse elle regarde un couple venu avec ses deux jeunes enfants, eux aussi habillés de jaune. Des adolescentes font des selfies. D’autres filment la manifestation et les posent sur les réseaux sociaux. Elle aussi aimerait poster une vidéo pour ses fils à l’étranger. L’un des jeunes prend le temps de lui expliquer la manipulation.
Mathilde rit un verre de vin chaud à la main. Un feu de palettes la réchauffe. Elle est tellement heureuse ! Elle revit. Toutes ces années de solitude se sont envolées. A cet instant présent elle se sent vivre. Elle se sent exister.
Mathilde n’entend pas l’avertissement, les cris. Elle continue de reculer pour pouvoir photographier la scène. Elle ne voit pas le camion qui manœuvre. Elle ne sent pas le choc et décède sur le coup. Le vin chaud se renverse sur la chaussée. Sa canne voltige au loin.
Mathilde se languit. Elle qui a toujours été de nature battante et dynamique s’ennuie maintenant. Parfois elle pense avec nostalgie au temps où elle se battait pour différentes causes. Cela a débuté en mai 68. Mathilde s’est engagée à corps perdu dans les manifestations avec toute la fougue de sa jeunesse. Elle en avait aimé l’enthousiasme, l’espérance, la liberté. C’est à ce moment-là qu’elle a rencontré Bernard son futur mari. Mai 68 fini, ils ont tous les deux continué à s’investir dans des combats professionnels.
Maintenant veuve, à la retraite, marchant difficilement avec une canne, elle se retrouve un peu cloitrée dans sa maison. Avide néanmoins de contacts, elle s’est mise aux réseaux sociaux et suit l’actualité sociale avec acuité.
L’appel des gilets jaunes l’interpelle, la galvanise. Dans ce mouvement naissant il lui semble retrouver la même liesse populaire qu’en mai 68. Le peuple qui veut faire entendre sa voix. Le peuple qui défie l’état.
Même si elle dispose de revenus corrects et qu’elle ne possède plus de voiture depuis longtemps, elle adhère aux revendications des gilets jaunes. Comprenant que ces revendications sont bien plus profondes que la simple hausse du carburant.
C’est ainsi que le 17 novembre 2018 Mathilde se retrouve au milieu de dizaines d’autres gilets jaunes à bloquer un rond-point stratégique d’entrée d’autoroute.
Mathilde est heureuse. Elle retrouve une atmosphère bon enfant fait de plaisir, de partage et d’échange ! Les clivages tombent, les générations se côtoient. Avec tendresse elle regarde un couple venu avec ses deux jeunes enfants, eux aussi habillés de jaune. Des adolescentes font des selfies. D’autres filment la manifestation et les posent sur les réseaux sociaux. Elle aussi aimerait poster une vidéo pour ses fils à l’étranger. L’un des jeunes prend le temps de lui expliquer la manipulation.
Mathilde rit un verre de vin chaud à la main. Un feu de palettes la réchauffe. Elle est tellement heureuse ! Elle revit. Toutes ces années de solitude se sont envolées. A cet instant présent elle se sent vivre. Elle se sent exister.
Mathilde n’entend pas l’avertissement, les cris. Elle continue de reculer pour pouvoir photographier la scène. Elle ne voit pas le camion qui manœuvre. Elle ne sent pas le choc et décède sur le coup. Le vin chaud se renverse sur la chaussée. Sa canne voltige au loin.
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: A.Mathilde
Un fait d'actualité... J'aurais aimé une fin plus heureuse...
Mais bravo, c'est très bien raconté !
Mais bravo, c'est très bien raconté !
FrançoiseB- Kaléïd'habitué
- Humeur : Sereine
Re: A.Mathilde
Oh quelle triste fin!
Mathilde a quand même eu une vie bien remplie et tu racontes bien son histoire.
Mathilde a quand même eu une vie bien remplie et tu racontes bien son histoire.
Zéphyrine- Modératrice écriture libre
- Humeur : Méditerranéenne
Re: A.Mathilde
J'aime bien la fin, qui démontre l'inanité de ces mouvements démagogiques imbéciles.
Les gilets jaunes font rire jaune… quand ils ne me font pas pleurer…
Anarchie générale avec ses 2 morts, ses 528 blessés dont 17 très gravement, et ce n'est pas fini évidemment…
À l'île de la Réunion, où travaille l'un de mes enfants, c'est l'insurrection généralisée le couvre-feu déclaré. On attend l'armée…
ça fera combien de morts là-bas ?
Quelques écervelés ont craqué une allumette et l'incendie sera partout, bien évidemment au détriment des gens les plus pauvres… comme d'habitude…
lamentable !
Les gilets jaunes font rire jaune… quand ils ne me font pas pleurer…
Anarchie générale avec ses 2 morts, ses 528 blessés dont 17 très gravement, et ce n'est pas fini évidemment…
À l'île de la Réunion, où travaille l'un de mes enfants, c'est l'insurrection généralisée le couvre-feu déclaré. On attend l'armée…
ça fera combien de morts là-bas ?
Quelques écervelés ont craqué une allumette et l'incendie sera partout, bien évidemment au détriment des gens les plus pauvres… comme d'habitude…
lamentable !
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: A.Mathilde
Quel gâchis ! Une belle vie qui se termine ainsi, pour rien !
Tu colles à l'actu, tout en traçant un beau parcours de vie !
Tu colles à l'actu, tout en traçant un beau parcours de vie !
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: A.Mathilde
En écoutant régulièrement la radio hier, je me replongeais dans l'ambiance de mai 68, époque où depuis la Suisse, je suivais l'évolution sur des postes comme Europe 1. D'autant plus que je me suis retrouvé dans le quartier latin le soir du 7 mai 1968, instants que je n'oublierai pas, j'étais en souci, et il parait que c'est rien par rapport à ce qui c'est passé d'autres nuits.
Un texte attendrissant, si bien écrit, montrant comme on peut remettre une personne seule en valeur.
Bien sur que j'aurais préféré une fin plus heureuse, mais la réalité est qu'elle n'a pas été heureuse pour ces 2 morts et les nombreux blessés.
Un texte attendrissant, si bien écrit, montrant comme on peut remettre une personne seule en valeur.
Bien sur que j'aurais préféré une fin plus heureuse, mais la réalité est qu'elle n'a pas été heureuse pour ces 2 morts et les nombreux blessés.
trainmusical- Occupe le terrain
- Humeur : à vous de juger :-)
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