A. une page se tourne

Chaque fois que je l'imagine à distance, je ne le vois pas lisant un journal mais un livre. Le journal des enfants l’intéresse peu, trop de coloriages et de jeux. Ce sont les histoires qui le passionnent. Mais il ne sait pas encore lire.

Le gamin a cinq ans, et il collectionne les lettres de son prénom, s’amuse à les reconnaître,et si il trébuche encore sur l’alphabet, chaque semaine il progresse, déclamant une suite de plus en plus longue de lettres qui se suivent.

Lorsqu’on lui raconte une histoire, il ne laisse rien passer. Il capture au vol le nouveau mot et demande : « c’est quoi ce mot ? », une fois la définition rendue il nous gratifie d’un « Ah, oui », et la lecture peut reprendre. Plus tard il nous servira ce même mot dans son bon contexte.

Nous on profite ! Car des livres et des histoires il en redemande. Pendant la lecture il se love contre nous, son écoute est très tactile, à tel point qu’il nous est parfois difficile de tourner les pages. Qu’ils sont délicieux ces moments câlins durant lesquels les mots racontés traversent son corps et s’impriment sur son visage, sous forme d’effroi, d’un sourire ou d’un franc éclat de rire !

Il est émerveillé par ce qui est écrit et tout ce que cela renferme, et si le privilège de la lecture est pour l’instant réservé aux « grands », il lui tarde d’apprendre. Chaque livre est un trésor mystérieux, il devine le monde merveilleux et infini enfoui dans les pages, la magie des lettres qui s’assemblent en mots comme autant d’énigmes dont il rêve de faire ses amies. Et il s’impatiente.

Aujourd’hui il est encore à la lisière, mais dans quelques mois il franchira la porte de la plus grande école où il apprendra à lire avec sa maîtresse. A apprivoiser patiemment les mots, en les caressant du doigt syllabe après syllabe à voix haute pour les encourager à se dévoiler. Chaque mot déchiffré sera une petite victoire qu’il s’empressera de remiser dans sa caboche.

Nous, ses grands-parents, nous perdrons le monopole des histoires. Il nous restera à l’aider à bricoler des phrases avec la boîte à outils que son institutrice lui aura fournie. Pour nous une page sera tournée, pour lui ce sera le  début de la grande évasion.

Viendra ensuite le moment, encore plus tard, ou devant les mètres de rayonnage de nos bibliothèques il nous demandera : « c’est bien Didier Van Cauwelaert ? Et Amélie Nothomb aussi ? » « Ok, je vais les charger sur ma tablette ! »

Tu décris parfaitement ces instants de lecture avec un petit enfant. C'est ce qui se passe avec Emilie ( la fille de Marie) qui a 3 ans et qui est très futée pour son âge. Il ne s'agit pas de passer un mot car elle me rappelle à l'ordre et de me dire le dernier mot de la phrase qu'elle n'a pas oublié!

Quel plaisir de voir qu'il existe encore des enfants plus émerveillés par un livre que par un écran. Et quel bonheur ce doit-être de partager ces moments de lecture privilégiés.
Plaisir de faire la lecture
Plaisir de faire découvrir à son petit-fils des histoires nouvelles, des mots nouveaux.
Plaisir de se dire que c'est ainsi qu'à son tour il deviendra un lecteur assidu

J'aime beaucoup ton texte qui est le reflet d'une situation à privilégier avec les petits.    
Je pense que les grands-parents ne perdent pas le monopole des histoires si on continue à leur en lire ou en leur raconter, même quand ils savent lire. Le plaisir de découvrir et d'écouter est toujours là et il faut l'entretenir. J'ai lu des histoires à des enfants de CM2 qui y prenaient beaucoup de plaisir.

Quel intense plaisir ce doit être de vivre auprès d'un enfant qui s'éveille  ( et de quelle façon ! ) à la connaissance

 à l'enfant  et  aux grands parents !

tu décris très bien l'échange affectif, au-delà de l'échange lecture/écoute, qu'il y a entre cet enfant et ses aieux.

c'est un texte très visuel, je trouve, on voit très bien la scene.

je trouve que toi comme myrte, vous écrivez de mieux en mieux.

Quel plaisir de te lire : c'est la description parfaite du rêve que j'ai toujours souhaité réaliser, donner le goût de la lecture à mes petits-enfants.
Mais voilà...c'était parfait jusqu'il y a peu de temps (ils ont 18 et 15 ans).A présent, quand je demande ce qu'ils lisent ils répondent : Bof, un livre que l'on nous impose au lycée! Quand on est obligé de lire on n'aime pas.
Je suis triste mais je garde espoir que bientôt nous reparlerons lecture...
Le prochain livre que l'aîné doit lire :  "La vie devant soi" Romain Garry.Je lui ai promis qu'il allait se régaler.

Un enfant qui lit ne s'ennuie jamais.
Un enfant qui lit, sera un écrivaine en devenir.
Un enfant qui lit ne peut t'apporter que du bonheur !

"il se love contre nous"... j'aime ce moment intense où un enfant s'abandonne à l'écoute d'une histoire... Un moment privilégié où le temps n'existe plus... J'ai adoré ce moment avec mes enfants autrefois, avec les enfants de la crèche hier,  avec ma petite-fille aujourd'hui...