A. L'Arpenteur
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Escandélia
trainmusical
Sherkane
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A. L'Arpenteur
Matiu était un enfant de la ville, né d’un père et d’une mère ouvriers. Affublé d’un pied bot, incapable de courir ou de jouer au ballon, il eut une enfance solitaire. Les garçons de son âge se moquaient de lui, certains allant même jusqu’à le bousculer pour qu’il tombe. Matiu serrait les dents. Pas question de laisser voir son désarroi même à ses parents.
Sa vie changea le jour où lui et toute sa famille assistèrent à une fête de «tchancayres ». Matiu regardait fasciné ces hommes faire la course, montés sur des hautes échasses. Ils se déplaçaient avec une agilité incroyable qui le laissait bouche-bée.
De ce jour Matiu s’exerça en cachette aux échasses. Il se les fabriqua lui-même. D’abord des petites puis des plus en plus grandes. Il adapta le « paousse pé » pour son pied bot. Son handicap n’était plus un problème. Il marchait sans boiter. Il lui semblait même voler. Il se sentait libre et riait.
A force de persévérance Matiu acquit une grande dextérité. Il commença à se faire un nom dans les fêtes de village. Mais cela ne lui permettait pas de vivre. Alors il s’engagea auprès de propriétaires de moutons pour garder les troupeaux dans les landes de Gascogne.
Il passa vingt ans à parcourir en tous sens ces grandes étendues basses et humides. Nul autre que lui ne connaissait mieux les traquenards et les pièges de ces landes marécageuses. Les gens du coin l’avaient surnommé : « L’Arpenteur ». En effet on ne voyait Matiu que juché sur ses grandes échasses. Il ne les quittait jamais. Certains racontaient qu’il dormait avec. D’autres qu’il avait aménagé toute sa maison pour un homme de 3m de haut ! Il est vrai que la hauteur de la porte d’entrée semblait le prouver. Mais tout cela n’était que des ouï dire. Matiu ne laissait entrer personne chez lui. Il était resté cet enfant solitaire qu’il avait été.
Matiu aimait il vraiment ses landes ? Ou était-ce sa liberté qu’il chérissait ? Toujours est-il qu’un jour « l’Arpenteur » disparut. Ce fut dans les années 1860, période où la loi imposa à toutes les communes des Landes de Gascogne de creuser des « crastes » et de boiser leurs territoires de pins maritimes. Il fallait faire quelque chose. Trop d’épidémies de paludisme, des terres infertiles, une population extrêmement pauvre. Les landes disparaissaient peu à peu, les derniers échassiers avec.
De ces étendues infertiles et âpres il ne reste plus que les photos de Felix Arnaudin et le conte de « l’Arpenteur » raconté aux petits maintenant que la lande n’existe plus.
« tchancayres » : hommes se déplaçant sur des échasses
« paousse pé » : le repose pied des échasses
« crastes » : fossés de drainage
Sa vie changea le jour où lui et toute sa famille assistèrent à une fête de «tchancayres ». Matiu regardait fasciné ces hommes faire la course, montés sur des hautes échasses. Ils se déplaçaient avec une agilité incroyable qui le laissait bouche-bée.
De ce jour Matiu s’exerça en cachette aux échasses. Il se les fabriqua lui-même. D’abord des petites puis des plus en plus grandes. Il adapta le « paousse pé » pour son pied bot. Son handicap n’était plus un problème. Il marchait sans boiter. Il lui semblait même voler. Il se sentait libre et riait.
A force de persévérance Matiu acquit une grande dextérité. Il commença à se faire un nom dans les fêtes de village. Mais cela ne lui permettait pas de vivre. Alors il s’engagea auprès de propriétaires de moutons pour garder les troupeaux dans les landes de Gascogne.
Il passa vingt ans à parcourir en tous sens ces grandes étendues basses et humides. Nul autre que lui ne connaissait mieux les traquenards et les pièges de ces landes marécageuses. Les gens du coin l’avaient surnommé : « L’Arpenteur ». En effet on ne voyait Matiu que juché sur ses grandes échasses. Il ne les quittait jamais. Certains racontaient qu’il dormait avec. D’autres qu’il avait aménagé toute sa maison pour un homme de 3m de haut ! Il est vrai que la hauteur de la porte d’entrée semblait le prouver. Mais tout cela n’était que des ouï dire. Matiu ne laissait entrer personne chez lui. Il était resté cet enfant solitaire qu’il avait été.
Matiu aimait il vraiment ses landes ? Ou était-ce sa liberté qu’il chérissait ? Toujours est-il qu’un jour « l’Arpenteur » disparut. Ce fut dans les années 1860, période où la loi imposa à toutes les communes des Landes de Gascogne de creuser des « crastes » et de boiser leurs territoires de pins maritimes. Il fallait faire quelque chose. Trop d’épidémies de paludisme, des terres infertiles, une population extrêmement pauvre. Les landes disparaissaient peu à peu, les derniers échassiers avec.
De ces étendues infertiles et âpres il ne reste plus que les photos de Felix Arnaudin et le conte de « l’Arpenteur » raconté aux petits maintenant que la lande n’existe plus.
« tchancayres » : hommes se déplaçant sur des échasses
« paousse pé » : le repose pied des échasses
« crastes » : fossés de drainage
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: A. L'Arpenteur
Magnifique texte où tu réussis avec habileté à romancer cette période historique.
Tes mots locaux enrichissent avec bonheur le récit.
Tes mots locaux enrichissent avec bonheur le récit.
trainmusical- Occupe le terrain
- Humeur : à vous de juger :-)
Re: A. L'Arpenteur
Tu nous offres un texte très bien documenté, avec des mots de parler local qui le font presque vrai. Un beau conte que voilà.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A. L'Arpenteur
Ton petit arpenteur, devenu grand grâce à ses échasses, et un personnage bien attachant. ON se prend à rêver qu'il a trouvé un autre endroit pour vivre paisiblement.
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: A. L'Arpenteur
J'aime beaucoup cette utilisation des échasses à pallier un handicap ...
On imagine le nombre de chutes qu'il a du endurer avant de maitriser le déplacement sur ces grands bâtons !
On imagine le nombre de chutes qu'il a du endurer avant de maitriser le déplacement sur ces grands bâtons !
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A. L'Arpenteur
Belle histoire d'un garçon qui surmonte son handicap et finit par devenir un héros de légende.
Tu parviens très bien à passer d'un réalisme pointu ( avec entre autre l'utilisation du patois) au quasi fantastique. Avec ton arpenteur, ces échasses rejoignent les bottes de sept lieues de notre enfance.
Tu parviens très bien à passer d'un réalisme pointu ( avec entre autre l'utilisation du patois) au quasi fantastique. Avec ton arpenteur, ces échasses rejoignent les bottes de sept lieues de notre enfance.
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: A. L'Arpenteur
Un cours d'histoire dissimulé dans un conte merveilleusement raconté. Un de ces contes qui touche et redonne du punch à celui qui en a besoin.
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
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