A – Ritournelle et pincement au coeur
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Escandélia
Admin
Tadig
7 participants
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A – Ritournelle et pincement au coeur
M’inspirer de cette photo pour écrire un texte ? Non mais vous rigolez. J’en ai presque la pétoche de me fourrer dans un labyrinthe jalonné de pancartes aux injonctions sybillines ou contradictoires, et de me perdre dans un dédale kafkaïen.
Dans le même temps elle m’est aussi familière et ravive bien des souvenirs. Cette photo me renvoie à mon premier boulot dans une boîte, où nuits et jours j’ai bossé plus de 20 ans en 3x8. Je connais bien ce type de réduit, en général dans un sous-sol humide, où pancartes, chaînes et cadenas, tout les matériels de sécurité de consignation étaient stockés pour les opérations d’entretien.
J’avais alors 18 ans et rêvais d’un monde meilleur avec une envie irrépressible de liberté. Profitant de dix jours de vacances j’ai retrouvé deux grands copains d’adolescence. De vrais amis sur qui je savais pouvoir toujours compter pour me tendre la main si un jour je désespérais de tout. Avec Henri et Baptiste, ensemble, nous étions avides de découvrir le monde et, bien évidemment, d’échapper à la tutelle parentale et au carcan familial. Désargentés mais prudents, nous avons décidé de quitter le Finistère en auto-stop pour rejoindre quelques capitales européennes.
Deux jours pour rejoindre Nantes, puis après une attente interminable un routier Flamand, nous prend en charge et nous dépose sur le port de Rotterdam. Une superbe destination qui nous fait sentir ce qui pourrait se révéler être une grande aventure. Mais c’est un cul de sac, nous n’avons encore rien vu des capitales espérées. Il nous reste cinq jours, il nous faut mettre les bouchées doubles.
La gare du chemin de fer nous offre un refuge pour la nuit. Curieusementelle elle bruit d’une animation exceptionnelle, des groupes de jeunes la sillonnent alors que les annonces de départ se succèdent en allemand, anglais, nééerlandais… D’évidence ces annonces ne nous concernent pas, faute d’argent nous ne pouvons pas nous offrir le train. Dépités Henri et moi partageons pain et sauccisson sec, alors que Baptiste le plus hardi d’entre nous a déjà lié connaissance.
Quelques minutes plus tard il est de retour le sourire aux lèvres « C’est bon, rangez vos sacs à dos on prend le train immédiatement ». D’une même voix Henri et moi :« Mais on n’a pas un rond pour nos billets ! » Il nous tend à chacun un dossier au papier glacé à notre nom avec sur la page de garde un slogan : « Donnez vos écrits en partage et voyagez gratuitement avec Kaleidoplumes ». C’est quoi ce truc là ? Nous ne pigeons pas très bien, il doit y avoir une entourloupe. Le mot Kaleidoplumes me rassure, j’imagine déjà bénéficier pour dormir d’un duvet confortable au lieu de mon sac à viande rudimentaire. Baptiste nous affranchit aussitôt : « C’est tout simple, nous voyageons la nuit pour rejoindre les capitales que nous visitons le jour. En retour Kaleidoplumes nous demande d’écrire quelques lignes pour raconter notre vie. Ce sera un vrai bonheur et nous l’écrirons en breton, ils auront bien un traducteur ».
Lorsque le train s’est ébranlé l’annonce continuait à être diffusée. Aujourd’hui encore à chaque départ je l’entends comme une ritournelle. Mais j’éprouve un pincement au cœur. Je n’ai jamais revu Baptiste qui un jour a choisi de se faire la belle. La ritournelle, elle, tourne toujours : « Kaléïdoplumes, 2 minutes d'arrêt, correspondance pour Bruxelles, Paris, Berlin, Genève ... »
Dans le même temps elle m’est aussi familière et ravive bien des souvenirs. Cette photo me renvoie à mon premier boulot dans une boîte, où nuits et jours j’ai bossé plus de 20 ans en 3x8. Je connais bien ce type de réduit, en général dans un sous-sol humide, où pancartes, chaînes et cadenas, tout les matériels de sécurité de consignation étaient stockés pour les opérations d’entretien.
J’avais alors 18 ans et rêvais d’un monde meilleur avec une envie irrépressible de liberté. Profitant de dix jours de vacances j’ai retrouvé deux grands copains d’adolescence. De vrais amis sur qui je savais pouvoir toujours compter pour me tendre la main si un jour je désespérais de tout. Avec Henri et Baptiste, ensemble, nous étions avides de découvrir le monde et, bien évidemment, d’échapper à la tutelle parentale et au carcan familial. Désargentés mais prudents, nous avons décidé de quitter le Finistère en auto-stop pour rejoindre quelques capitales européennes.
Deux jours pour rejoindre Nantes, puis après une attente interminable un routier Flamand, nous prend en charge et nous dépose sur le port de Rotterdam. Une superbe destination qui nous fait sentir ce qui pourrait se révéler être une grande aventure. Mais c’est un cul de sac, nous n’avons encore rien vu des capitales espérées. Il nous reste cinq jours, il nous faut mettre les bouchées doubles.
La gare du chemin de fer nous offre un refuge pour la nuit. Curieusementelle elle bruit d’une animation exceptionnelle, des groupes de jeunes la sillonnent alors que les annonces de départ se succèdent en allemand, anglais, nééerlandais… D’évidence ces annonces ne nous concernent pas, faute d’argent nous ne pouvons pas nous offrir le train. Dépités Henri et moi partageons pain et sauccisson sec, alors que Baptiste le plus hardi d’entre nous a déjà lié connaissance.
Quelques minutes plus tard il est de retour le sourire aux lèvres « C’est bon, rangez vos sacs à dos on prend le train immédiatement ». D’une même voix Henri et moi :« Mais on n’a pas un rond pour nos billets ! » Il nous tend à chacun un dossier au papier glacé à notre nom avec sur la page de garde un slogan : « Donnez vos écrits en partage et voyagez gratuitement avec Kaleidoplumes ». C’est quoi ce truc là ? Nous ne pigeons pas très bien, il doit y avoir une entourloupe. Le mot Kaleidoplumes me rassure, j’imagine déjà bénéficier pour dormir d’un duvet confortable au lieu de mon sac à viande rudimentaire. Baptiste nous affranchit aussitôt : « C’est tout simple, nous voyageons la nuit pour rejoindre les capitales que nous visitons le jour. En retour Kaleidoplumes nous demande d’écrire quelques lignes pour raconter notre vie. Ce sera un vrai bonheur et nous l’écrirons en breton, ils auront bien un traducteur ».
Lorsque le train s’est ébranlé l’annonce continuait à être diffusée. Aujourd’hui encore à chaque départ je l’entends comme une ritournelle. Mais j’éprouve un pincement au cœur. Je n’ai jamais revu Baptiste qui un jour a choisi de se faire la belle. La ritournelle, elle, tourne toujours : « Kaléïdoplumes, 2 minutes d'arrêt, correspondance pour Bruxelles, Paris, Berlin, Genève ... »
Tadig- Kaléïd'habitué
- Humeur : Bonne
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
Tres tres chouette ton texte Tadig.
J'étais persuadée que tu me racontais un episode de ta propre vie alors que, apparemment, c'est un récit sorti tout droit de ton imagination.
Quoique, j'ai quelques doutes. Es- tu vraiment parti avec des copains ou tout est inventé?
En tout cas, voilà encore un super texte
J'étais persuadée que tu me racontais un episode de ta propre vie alors que, apparemment, c'est un récit sorti tout droit de ton imagination.
Quoique, j'ai quelques doutes. Es- tu vraiment parti avec des copains ou tout est inventé?
En tout cas, voilà encore un super texte
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
Un texte tout droit sorti des rêves d'adolescent. C'est si beau la jeunesse. En ce temps il suffisait d'y croire et le monde meilleur n'était pas si loin tout compte fait.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
L'écriture comme un voyage... C'est excellent !
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
Et moi, je lis ton texte comme une aventure réelle, jusqu'à Rotterdam. Après, tu as transformé la fin, comme si tu l'avais rêvée. Magnifique incursion dans ton passé, et belle imagination qui nous bascule dans ton merveilleux vagabondage. J'ai apprécié le voyage.
virgul- Kaléïd'habitué
- Humeur : optimiste
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
Très sympa lorsque l'on passe de ce qui peut être réel (et qui est peut-être réel) à ce qui est imagination.
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
Re: A – Ritournelle et pincement au coeur
Tu m'as surprise, moi qui lisais avec passion le récit de ta jeunesse.....
La frontière est tenue entre le réel et l'imaginaire.
Je trouve ce texte original et excellent
La frontière est tenue entre le réel et l'imaginaire.
Je trouve ce texte original et excellent
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
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