A- L'homme de Picardie.
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AlainX
Escandélia
6 participants
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A- L'homme de Picardie.
Je l’ai reconnu tout de suite…l’homme de Picardie, moi qui venais du Forez. Il faut vous dire aussi que depuis un certain temps j'avais pris l'habitude de le lire. Il avait écrit. Des textes, des livres, j'avais lu les textes. J'avais lu les livres. Je savais désormais qu'il était d'une nature bien plus profonde que ce qu''il nous donnait à paraitre. Mais ne l'avais-je pas toujours su ? Très tôt, j'avais décelé en lui cette facilité qu'il avait à parler, de lui, des autres, de sa vie, des choses graves et de ce qui l'est moins. De Dieu, aussi, un pote à lui sans doute, puisqu'il lui écrivait des lettres. Lettres aux quelles il ne répondait pas, Dieu. Lettres qu'il ne lisait probablement pas, Dieu. Les ouvrait il seulement ? Toujours est il qu'il ne se précipitait pour écouter ses conseils et changer ce qui ne va pas en ce monde.
Alors les choses allant de mal en pis, il écrivait, l'homme de Picardie. De sa plume agile et avertie, il se fendait d'un texte, puis d'un autre et encore et encore. Toujours plongé dans ses pensées, tourné vers l'autre, il expliquait, argumentait, commentait.
Et moi, l'Auvergnate du Livradois - Forez, je lisais. Oh ce n'était pas difficile ! Il suffisait d'ouvrir en grand le livre. Je partageais ainsi ses brulures, ses insomnies. Les coups bas de la vie et ses blessures.
Lorsqu'il se présenta aux élections pour la gouvernance de notre petit pays, je fis campagne pour lui. Son programme, sans doute.
Venant tout juste de débarquer ici, en contournant l'immeuble à l'angle de la rue, je tombais sur ces silhouettes grandeur nature. L'une d'elle me proposais de m'attarder un peu et montrait un couple avec du bonheur et rien d'autre. Je ne connaissais pas grand monde, il faut bien vous l'avouer, alors je l'écoutais. Je fus sans ambiguïté séduite par ce qu'il proposait. La chose fut entendue, je ne lésinais pas sur les efforts, ni même sur les moyens. Je m'investis directrice de campagne, pas moins. Il fallait bien tout ça, pour notre foi commune en l'humain !
Pour donner adhésion à sa cause, descendant de ma montagne, je courrais jusqu'à la mer. Là où le ciel se confond avec la terre. Là où les nuages sont si bas que les canaux se perdent, dans ce pays si plat où les blés sont si beaux qu'on lui pardonne de n'avoir pour relief que quelques clochers et quelques terrils rescapés d'une industrie en friche reconvertis en camps de dunes et de mirages pour passagers clandestins.
Je courrais jusqu'à la mer, cette mer froide et grise au reflets changeants quand le soleil se couche au loin sur les falaises de Douvres. Cette mer où les vagues s'écrasent sur les rochers crayeux mélangeant leur écume aux larmes des femmes attendant leurs marins. Cette mer incertaine qui va en s'évasant, de l'Angleterre à la France pour que le migrant s'essouffle et disparaisse au loin. Cette mer qui sépare. Cette mer qui déchire.
Mais cette mer qui rassure quand elle roule sur la plage ses galets mouillés ou ses grains de sable ruisselants. Cette mer si belle quand le soleil flamboie. Cette mer qui s'étend de la Somme à l'Artois, et qui donne à ses plages un charme si profond que les rivières s'effacent en l'effleurant. Cette mer qui sait être digne et faire face quand l'orage descend. Quand monte la tempête et que l'horizon s'effondre en un basculement. Cette mer qui lui ressemble. Cette mer qui s'apprivoise un court instant et qui reprend son souffle avec le courant.
Alors les choses allant de mal en pis, il écrivait, l'homme de Picardie. De sa plume agile et avertie, il se fendait d'un texte, puis d'un autre et encore et encore. Toujours plongé dans ses pensées, tourné vers l'autre, il expliquait, argumentait, commentait.
Et moi, l'Auvergnate du Livradois - Forez, je lisais. Oh ce n'était pas difficile ! Il suffisait d'ouvrir en grand le livre. Je partageais ainsi ses brulures, ses insomnies. Les coups bas de la vie et ses blessures.
Lorsqu'il se présenta aux élections pour la gouvernance de notre petit pays, je fis campagne pour lui. Son programme, sans doute.
Venant tout juste de débarquer ici, en contournant l'immeuble à l'angle de la rue, je tombais sur ces silhouettes grandeur nature. L'une d'elle me proposais de m'attarder un peu et montrait un couple avec du bonheur et rien d'autre. Je ne connaissais pas grand monde, il faut bien vous l'avouer, alors je l'écoutais. Je fus sans ambiguïté séduite par ce qu'il proposait. La chose fut entendue, je ne lésinais pas sur les efforts, ni même sur les moyens. Je m'investis directrice de campagne, pas moins. Il fallait bien tout ça, pour notre foi commune en l'humain !
Pour donner adhésion à sa cause, descendant de ma montagne, je courrais jusqu'à la mer. Là où le ciel se confond avec la terre. Là où les nuages sont si bas que les canaux se perdent, dans ce pays si plat où les blés sont si beaux qu'on lui pardonne de n'avoir pour relief que quelques clochers et quelques terrils rescapés d'une industrie en friche reconvertis en camps de dunes et de mirages pour passagers clandestins.
Je courrais jusqu'à la mer, cette mer froide et grise au reflets changeants quand le soleil se couche au loin sur les falaises de Douvres. Cette mer où les vagues s'écrasent sur les rochers crayeux mélangeant leur écume aux larmes des femmes attendant leurs marins. Cette mer incertaine qui va en s'évasant, de l'Angleterre à la France pour que le migrant s'essouffle et disparaisse au loin. Cette mer qui sépare. Cette mer qui déchire.
Mais cette mer qui rassure quand elle roule sur la plage ses galets mouillés ou ses grains de sable ruisselants. Cette mer si belle quand le soleil flamboie. Cette mer qui s'étend de la Somme à l'Artois, et qui donne à ses plages un charme si profond que les rivières s'effacent en l'effleurant. Cette mer qui sait être digne et faire face quand l'orage descend. Quand monte la tempête et que l'horizon s'effondre en un basculement. Cette mer qui lui ressemble. Cette mer qui s'apprivoise un court instant et qui reprend son souffle avec le courant.
Dernière édition par Escandélia le Sam 4 Mar - 9:24, édité 3 fois (Raison : j'ai remis le bon titre qui avaitdisparu sans aucune raison compréhensible par moi.)
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Wahou !
Quel texte...
Je suis ému et touché…
Quel texte...
Je suis ému et touché…
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: A- L'homme de Picardie.
Reconnais quand même que l'occasion était trop belle, non ?
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Très touchée par la façon dont tu parles de cet homme de Picardie que tu as lu, que tu as soutenu, que tu as suivi jusqu'à la mer...
Par cette évocation du plat pays de Brel et de cette ressemblance de l'homme avec la mer...
La photo de la consigne, à peine effleurée en passant, parle d'un amour heureux et d'une solitude...
Par cette évocation du plat pays de Brel et de cette ressemblance de l'homme avec la mer...
La photo de la consigne, à peine effleurée en passant, parle d'un amour heureux et d'une solitude...
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Il fallait bien tout ça, pour notre foi commune en l'humain !
Il n'y a pas si longtemps, j'ai cru à ceux qui se réclamaient de l'Humain.
S'il s'en réclame encore aujourd'hui, force est de constater que l'égocentrisme a pris le dessus : Dommage !
Sinon, ton texte est magnifique ...
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A- L'homme de Picardie.
Et bien j'y crois encore ! quant à l'égocentrisme, ma foi, je ne sais pas toujours bien où le situer, par contre je lis et j'entends de belles choses de ce côté là quand même.Cats a écrit:Il n'y a pas si longtemps, j'ai cru à ceux qui se réclamaient de l'Humain.
S'il s'en réclame encore aujourd'hui, force est de constater que l'égocentrisme a pris le dessus :
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Myrthe, j'ai juste envie de te répondre que : Je ne sais pas très bien de quoi parle exactement la photo, à moi, elle ne me parle pas spécialement et mon imagination débordante, n'est ce pas.... Par contre, je tenais à m'inscrire dans cette consigne.
Je pense que j'ai fais selon mon coeur et mes convictions. J'ai tenté des recherches qui se sont révélées infructueuses sur les archives de Kalé, car je suis arrivée ici en 2012 ou 2011 (tu vois je ne sais plus !) mais je crois que c'était en 2012 un 11 novembre. Ce dont je me souviens, c'est que tout Kalé était en effervescence, on venait de fêter l'anniversaire d'Amanda et on pensait à fêter celui de Kalé. Parmi les exercices proposés dans ce cadre, il fallait remplacer l'Admin pendant un mois. Pour ce faire, des élections étaient organisées et une campagne électorale improvisée. Ce sont à ces élections que je fais allusion . Naturellement j'avais choisi le meilleur candidat !
(et au passage, le plat pays n'est pas que celui de Jacques Brel !)
Je pense que j'ai fais selon mon coeur et mes convictions. J'ai tenté des recherches qui se sont révélées infructueuses sur les archives de Kalé, car je suis arrivée ici en 2012 ou 2011 (tu vois je ne sais plus !) mais je crois que c'était en 2012 un 11 novembre. Ce dont je me souviens, c'est que tout Kalé était en effervescence, on venait de fêter l'anniversaire d'Amanda et on pensait à fêter celui de Kalé. Parmi les exercices proposés dans ce cadre, il fallait remplacer l'Admin pendant un mois. Pour ce faire, des élections étaient organisées et une campagne électorale improvisée. Ce sont à ces élections que je fais allusion . Naturellement j'avais choisi le meilleur candidat !
(et au passage, le plat pays n'est pas que celui de Jacques Brel !)
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Escandelia, toi tu as écrit ce qui te passait par la tête en lisant la consigne et moi j'ai commenté ton texte en écrivant ce qui me passait par la tête, mon ressenti en le lisant...
0n crois ressentir ce que l'autre a écrit et on parle encore de soi sans y penser...
0n crois ressentir ce que l'autre a écrit et on parle encore de soi sans y penser...
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A- L'homme de Picardie.
Un très beau texte plein d'émotion. Tu as bien fait de suivre ton imagination, pour notre grand plaisir.
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: A- L'homme de Picardie.
Un beau texte tout en sensibilité et de très belles images dans les derniers paragraphes. Touché!
virgul- Kaléïd'habitué
- Humeur : optimiste
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