A. Ça c'est Palace !

Je n'aurais jamais dû le suivre dans cette aventure, alors que j'avais le pressentiment que cela ne se passerait pas comme il l'avait prévu. Mais voilà, je suis influençable et j'en rêvais depuis si longtemps de séjourner dans un de ces nouveaux palaces qui promettaient les services les plus sophistiqués. Les possibilités étaient, paraît-il, au-delà de tout ce que l'on pouvait imaginer. Djamel m'en avait énoncé quelques-unes qui dépassaient même mon imaginaire le plus farfelu. Et là, j'aurais dû me douter. Faut croire que je resterai éternellement une jeune fille naïve !

Djamel avait réservé une suite au 72ème étage. Paraît qu'il y avait même une piscine privée. J'y croyais pas ! Il me montra des photos. Ça avait l'air vrai. Je te raconte pas le lit tout rond, on aurait pu y dormir à six !
il me dit : — « Tu verras la salle de bain est plus vaste que le grand salon de tes parent. Elle comporte quatre lavabos, deux douches, un sauna et un jacuzzi.
— N'importe quoi que j'ai répondu, faut pas me prendre pour une gourde. Ça n'existe pas.
Mais là encore il avait des photos. Il m'a dit qu'il avait des cachetons, et qu'après en avoir avalé deux je ne serai plus la même. Il me promettait une nuit que je ne pourrai pas oublier de ma vie.

On a embarqué dans sa BMW, que je sais toujours pas comment il peut se payer ça, et on a quitté Paris direction Franconville ou quelque chose comme ça. Un moment Djamel s'est arrêté et il a sorti de sa poche un foulard de soie en me disant :
— faut que je te bande les yeux pour que la surprise soit totale.
J'ai pas aimé, je lui ai même dit qu'il n'était pas question. Alors il a rétorqué : — Quoi ? Tu ne me fais pas confiance ?
Qu'est-ce que vous voulez répondre à ça. Bien sûr que je faisais confiance puisque je l'aimais. Je lui avais quand même largement démontré ma confiance  dans la manière de m'y prendre au pieu. Si les trucs que je lui faisais c'était pas lui faire confiance ! Alors ce serait quoi faire confiance ?…

On a garé la BM dans un parking souterrain m'a-t-il semblé. J'avais toujours les yeux bandés. Il m'a fait remonter à pied la rampe d'accès en me disant qu'on allait  bénéficier de l'entrée réservée. Une fois l'intérieur j'ai pu enlever le bandeau. C'était un grand hall, genre palais des glaces. Des miroirs partout. Je me suis dit pourvu que la chambre ne soit pas aussi avec des miroirs partout, j’ai pas envie de faire de l'exhibitionnisme pour lui faire plaisir.

Dans l’entrée il n’y avait personne d’autre que nous. C'est bizarre que j'ai dit à Djamel. Il m'a répondu que c'était une entrée privée pour Super-VIP, et qu’à cette heure là personne n'était encore arrivé vu qu'en général ils se pointent vers 22 heures. Mais nous, on allait pas attendre jusque-là. J’avais l'impression que le hall c'était juste un petit hors-d'œuvre et qu'il allait de nouveau me bander les yeux. J'ai un peu tiqué, mais comme il a pris mes lèvres et que ça je peux pas résister, forcément, je me suis laissée faire.
Une fois les yeux rebandés j'ai compris qu'il ouvrait la porte du hall et j'entendu le « ding » d'un ascenseur. Il y avait quand même une odeur bizarre dans cet ascenseur, et puis il ne montait pas très vite. À cette allure là, y en avait pour une plombe pour arriver au 72e étage !
Mais Djamel me rassura. L'impression de lenteur c'était justement parce que l'ascenseur allait très vite et que l'on ne s'en rendait pas compte. J'ai trouvé ça curieux, mais bon… ça allait être l'aventure !

A la sortie de l'ascenseur j’entendis Djamel ouvrir une porte avec une clé. Pourtant j'avais vu dans les films que dans ce genre de Palace on ouvrait avec une carte magnétique, et en plus il y avait toujours cette odeur de rance et de moisissures. j'ai dit : — je peux enlever le bandeau ?
— Non, répondit-il pas tout de suite. Alors il me mit un truc sur la tête, ça faisait un peu casque de moto et il me dit : — Tu peux enlever le foulard.
J'ai alors compris que c'était un casque de réalité virtuelle, comme lorsqu’on avait joué à « laser game » chez « Zone 360 ». J'ai voulu l'enlever, mais Djamel me le maintenait sur la tête et le programme venait de démarrer.
On était dans un Palace, le palace de mes rêves, avec tout ce que Djamel m'avait décrit. Suis allée dans la salle de bain virtuelle et là je me suis prise au jeu. J'ai commencé à me déshabiller. J'ai senti Djamel dans mon dos collé à moi. C'était presque magique. J'ai alors pensé : —  On doit être chez lui finalement et cette odeur curieuse que je reconnaissais et qui s'était amplifiée  dans mes narines parce que j'avais les yeux bandés.
Il n'a pas fallu bien longtemps pour qu'on se retrouve sur le lit virtuel. Pas si virtuel que cela. C'était le sien. Djamel m'a proposé un verre d'eau et les deux pilules parce que je transpirais sous ce casque.

Quelques minutes après tout a basculé… j'avoue que je ne me souviens plus beaucoup de ce qui s'est passé ensuite. Il me reste seulement des douleurs dans le bas-ventre et dans le bas du dos.
Quand j’ai vraiment repris mes esprits, Djamel était parti. En fait, on n'était pas chez lui. J'ignore même encore aujourd'hui ou ça s’est passé. J'ai pris mes affaires et je me suis tirée. Dans la rue j'ai levé les yeux sur un HLM plutôt pourri. Je suis partie en courant, la boule au ventre. Heureusement quelques centaines de mètres plus loin j'ai aperçu une station du RER et je m’y suis engouffrée.

Parfois je me demande ce qu'est devenu Djamel, et s'il a fait le même coup à d'autres nanas.