A. David et les siens
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Amanda.
FrançoiseB
Nerwen
Charlotte
8 participants
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A. David et les siens
Ils avaient été entassés, encaqués, tels des bêtes, dans des wagons, sans eau, sans lumière, sans le moindre petit morceau de pain, pour une destination inconnue, là-bas, très loin, là où mourir est programmé, exécuté du matin au soir, du soir au matin sans discontinuité.
Durant cet interminable , insoutenable voyage, des enfants hurlaient de peur, de froid .Des hommes et des femmes criaient, se piétinaient les uns sur les autres. Tout ce monde d’humains déféquait et urinait à même le sol , l’odeur était pestilentielle. La mort rodait tel un rapace à se précipiter, à se jeter sur les plus faibles.
David avait 20 ans . Son père et sa mère avaient disparus depuis un an déjà, dans un convoi similaire et n’étaient jamais revenus . David s’était juré de les retrouver.
C’est à cela qu’il pensait debout , coincé, écrasé, contre la porte du dernier wagon. Un petit matin, après une longue nuit d’enfer il parvint, à s’extraire en plein vol , hors de cette puanteur ,hors de ce train, hors de cet innommable détresse.
Il n’a jamais pu me raconter comment il avait réussi cet exploit comme si sa mémoire, son cœur, ne voulait pas s’en souvenir, n’en voulait plus rien savoir.
Il se rappelle pourtant s’être vu, libre, debout, en plein courant d’air, sur un pont , au bord d’une ligne de chemin de fer, avec à la main, sa valise vide de tous ses maigres biens mais remplie d’un cœur assoiffé par le désir de vivre, de faire vivre, de vaincre l’infamie, de vaincre la mort .
David s’engagea dans la résistance. Et de victime il devint un héros. C’est pas lui qui le dit et le pense : c’est moi qui l’affirme haut et fort.
Il ne retrouva jamais ses parents. Ceux-ci furent gazés et brûlés à Buchenwald comme six millions de juifs.
Il est mort en l’an 2O02 à 80 ans . Je pense à lui .
J’aime me raconter que son cœur se balade désormais en plein courant d’air et… est donc encore un peu auprès de moi.
Durant cet interminable , insoutenable voyage, des enfants hurlaient de peur, de froid .Des hommes et des femmes criaient, se piétinaient les uns sur les autres. Tout ce monde d’humains déféquait et urinait à même le sol , l’odeur était pestilentielle. La mort rodait tel un rapace à se précipiter, à se jeter sur les plus faibles.
David avait 20 ans . Son père et sa mère avaient disparus depuis un an déjà, dans un convoi similaire et n’étaient jamais revenus . David s’était juré de les retrouver.
C’est à cela qu’il pensait debout , coincé, écrasé, contre la porte du dernier wagon. Un petit matin, après une longue nuit d’enfer il parvint, à s’extraire en plein vol , hors de cette puanteur ,hors de ce train, hors de cet innommable détresse.
Il n’a jamais pu me raconter comment il avait réussi cet exploit comme si sa mémoire, son cœur, ne voulait pas s’en souvenir, n’en voulait plus rien savoir.
Il se rappelle pourtant s’être vu, libre, debout, en plein courant d’air, sur un pont , au bord d’une ligne de chemin de fer, avec à la main, sa valise vide de tous ses maigres biens mais remplie d’un cœur assoiffé par le désir de vivre, de faire vivre, de vaincre l’infamie, de vaincre la mort .
David s’engagea dans la résistance. Et de victime il devint un héros. C’est pas lui qui le dit et le pense : c’est moi qui l’affirme haut et fort.
Il ne retrouva jamais ses parents. Ceux-ci furent gazés et brûlés à Buchenwald comme six millions de juifs.
Il est mort en l’an 2O02 à 80 ans . Je pense à lui .
J’aime me raconter que son cœur se balade désormais en plein courant d’air et… est donc encore un peu auprès de moi.
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A. David et les siens
Un récit très émouvant qui redonne vie à ce héros inconnu...
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: A. David et les siens
Un récit tout plein d'émotions... qui ne laisse pas indifférent.
Merci Charlotte.
Merci Charlotte.
FrançoiseB- Kaléïd'habitué
- Humeur : Sereine
Re: A. David et les siens
Tu ne l'as pas inventé je pense, à sentir l'émotion qui se dégage de ton texte...Tes deux premiers paragraphes sont bouleversants, tu as su trouver les mots pour décrire l'horreur et la souffrance
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: A. David et les siens
Un récit qui vient du coeur, prenant, émouvant!
Il me semble aussi que c'est du vécu, de toutes façons
Il me semble aussi que c'est du vécu, de toutes façons
Zéphyrine- Modératrice écriture libre
- Humeur : Méditerranéenne
Re: A. David et les siens
Bravo Charlotte, bravo pour ce très beau texte, plein de colère et d'émotion, comme si tu l'avais écrit d'un seul jet.
Bravo d'être à ta façon passeur de mémoire pour que personne n'oublie et pour rendre justice à David et tous ceux qui ont vécu l'innommable
Bravo d'être à ta façon passeur de mémoire pour que personne n'oublie et pour rendre justice à David et tous ceux qui ont vécu l'innommable
Cassy- Admin
- Humeur : Déterminée
Re: A. David et les siens
Rien n'est inventé cela s'est passé comme je le décris mais ce n'est pas du vécu. Après avoir lu le livre de Jorge Semprun "l'écriture ou la vie" qui m'a fort bouleversée je n'ai pu m'empêcher de traiter de ce sujet avec l'émotion que j'avais ressentie en lisant ce livre pas facile et très douloureux.
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: A. David et les siens
Ton texte m'évoque la chanson "Nuit et brouillard" de Jean Ferrat. Il est à la fois dur dans ses détails réalistes et touchant dans ce qu'il éveille en nous. On a vraiment l'impression que tu parles d'un être cher.
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A. David et les siens
C'est vrai qu'on dirait du vécu. Un tout bon texte. Et je ne peux qu'encourager le rappel de ces horreurs dans le contexte de la montée du populisme et de l'extrême droite qui ont les idées aussi courtes que leur mémoire.
virgul- Kaléïd'habitué
- Humeur : optimiste
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