Un dimanche 8 mai 1842.
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Sherkane
Amanda.
Myriel
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catsoniou
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Un dimanche 8 mai 1842.
Tous ceux qui se souviennent de Nola diront qu'elle était une jeune fille merveilleuse et rieuse jusqu'à ce fameux dimanche du 8 mai 1842. C'était la fête du roi Louis-Philippe et l'on se bousculait pour assister au spectacle des grandes eaux au parc de Versailles.
Nola avait 20 ans et la fraîcheur de son âge. Elle était venue avec son fiancé Henri, un dynamique trentenaire, se promener dans le parc tout comme de nombreux parisiens. L'air était doux, délicat et surprenant. La luminosité retrouvée tournait un peu la tête, comme après un bon verre de vin. Les pelouses du parc parsemées de fleurs blanches jaunes roses violettes invitaient les amoureux à se poser pour égrainer des promesses d'amour éternels. La main dans celle d’Henri, le cœur battant la chamade après une salve de baiser fougueux, Nola se sentait invincible. Elle n'arrivait pas à se persuader qu'il fallait devoir reprendre le lendemain sa place à la capsulerie familiale dans les odeurs de poudre et le bruit des machines.
En fin d'après-midi, la foule se pressait sur la rive gauche de la gare de Versailles - pour regagner Paris. Le convoi s'étirait sur plus de 120 mètres. Il était composé de deux locomotives de tête avec leur tender et de dix huit voitures. Cette longue chaîne de wagons réunis bout à bout vacillait en avançant, se tordant et glissant comme un serpent, laissant derrière elle un épais tourbillon de vapeur odorante.
La foule empressée encombrait les salles d’attente où éclatait des murmures d’impatience. Nola et Henri s'étaient glissés non sans peine dans la voiture de tête, la n°1 leur chiffre fétiche. Ils étaient si nombreux et si serrés qu’Henri avait été obligé d'éventer de son journal le visage rosi de sa chère Nola qui avait presque failli s'évanouir.
Le drame survint à Meudon, alors que le train ne roulait qu'à 40 km/h, dans la tranchée de Bellevue, au droit du pavé des Gardes. Sans crier garde sans doute succombant à la surcharge de passagers, un des essieux de la petite locomotive de tête se brisa faisant dérailler le train qui vint s'enfoncer dans le talus.
Le premier wagon, dans lequel se trouvait Nola et Henri, tomba en se brisant sur le flanc droit, en versant au pied du talus des voyageurs plus ou moins contusionnés, que cette chute préserva de l’horrible destruction qu'ils virent s’accomplir derrière eux. En effet, sous le poids du convoi lancé les dix huit wagons suivants se percutèrent les uns les autres, se chevauchant, comme s'ils voulaient ne plus faire qu'un. Les morceaux de charbon ardents de la machine à vapeur se disséminèrent mettant rapidement le feu au à l'enchevêtrement de voitures en bois.
Nola et Henri sous le choc avaient été précipités l'un contre l'autre, Henri était couvert de sang, le nez probablement fracturé. Nola n'était pas blessée mais sa jolie robe du dimanche était piteusement déchirée sur toute la longueur laissant deviner de longues et charmantes jambes gainées de soie. Henri avait rapidement pris les choses en main, rampant sur le sol accidenté, il avait empoigné Nola pour l'entrainer en haut du talus. Nola avait l'impression d'être une poupée de chiffon, elle laissa Henri la guider vers la lumière pour finir par s'évanouir dans les bras d'un villageois venu prêter main forte aux
En bas l'incendie faisait rage. Les passagers étaient prisonniers, comme à chaque voyage les voitures avaient été fermées à clé de l'extérieur avant le départ du train. Henri s'était dit que c'était une bonne chose au regard du nombre de jeunes enfants présents dans le train qui pouvaient échapper au contrôle de leur parent et tenter d'ouvrir une porte pour regarder dehors. Les enfants ne sont ils pas curieux au-delà de toute attente.
L'air qui embaumait les fleurs et le bonheur quelques heures auparavant était maintenant devenu brûlant. Après la panique générale, le désastre se fit jour : le feu s’était communiqué à l’amas de voitures brisées, favorisé par l'enduit de peinture, les malheureux victimes déjà à moitié asphyxiées, se débattaient au milieu des débris. Les unes couvertes de sang, les autres brûlées par la vapeur s'échappant des chaudières éventrées, couraient dans tous les sens comme pour échapper à leur douleur, tandis que de plus infortunées périssaient consumées dans les flammes, sans qu’il soit possible qu'on leur porta secours. L'incendie ne fut maîtrisé qu'à neuf heures du soir, laissant derrière lui une vision proche de l'enfer.
Quarante-trois personnes périrent dans l'accident, neuf moururent de leurs blessures les jours suivants et l'on compta plus d'une centaine de blessés graves.
Nola ne reprit jamais le train depuis ce funeste jour de mai. Henri qui était journaliste participa à une importante campagne de presse contre les chemins de fer.
Une chapelle blanche en pierre de taille fut bâtie à proximité immédiate de la catastrophe quelques mois après en mémoire des victimes et inaugurée le 16 novembre 1842 par l'évêque de Versailles.
Pendant presque cinquante après la catastrophe, chaque 8 mai à 18h, Nola et Henri vinrent déposer un bouquet de fleurs des champs au pied de « Notre Dame des Flammes » en souvenir de leur innocence partie en fumée.
Nola avait 20 ans et la fraîcheur de son âge. Elle était venue avec son fiancé Henri, un dynamique trentenaire, se promener dans le parc tout comme de nombreux parisiens. L'air était doux, délicat et surprenant. La luminosité retrouvée tournait un peu la tête, comme après un bon verre de vin. Les pelouses du parc parsemées de fleurs blanches jaunes roses violettes invitaient les amoureux à se poser pour égrainer des promesses d'amour éternels. La main dans celle d’Henri, le cœur battant la chamade après une salve de baiser fougueux, Nola se sentait invincible. Elle n'arrivait pas à se persuader qu'il fallait devoir reprendre le lendemain sa place à la capsulerie familiale dans les odeurs de poudre et le bruit des machines.
En fin d'après-midi, la foule se pressait sur la rive gauche de la gare de Versailles - pour regagner Paris. Le convoi s'étirait sur plus de 120 mètres. Il était composé de deux locomotives de tête avec leur tender et de dix huit voitures. Cette longue chaîne de wagons réunis bout à bout vacillait en avançant, se tordant et glissant comme un serpent, laissant derrière elle un épais tourbillon de vapeur odorante.
La foule empressée encombrait les salles d’attente où éclatait des murmures d’impatience. Nola et Henri s'étaient glissés non sans peine dans la voiture de tête, la n°1 leur chiffre fétiche. Ils étaient si nombreux et si serrés qu’Henri avait été obligé d'éventer de son journal le visage rosi de sa chère Nola qui avait presque failli s'évanouir.
Le drame survint à Meudon, alors que le train ne roulait qu'à 40 km/h, dans la tranchée de Bellevue, au droit du pavé des Gardes. Sans crier garde sans doute succombant à la surcharge de passagers, un des essieux de la petite locomotive de tête se brisa faisant dérailler le train qui vint s'enfoncer dans le talus.
Le premier wagon, dans lequel se trouvait Nola et Henri, tomba en se brisant sur le flanc droit, en versant au pied du talus des voyageurs plus ou moins contusionnés, que cette chute préserva de l’horrible destruction qu'ils virent s’accomplir derrière eux. En effet, sous le poids du convoi lancé les dix huit wagons suivants se percutèrent les uns les autres, se chevauchant, comme s'ils voulaient ne plus faire qu'un. Les morceaux de charbon ardents de la machine à vapeur se disséminèrent mettant rapidement le feu au à l'enchevêtrement de voitures en bois.
Nola et Henri sous le choc avaient été précipités l'un contre l'autre, Henri était couvert de sang, le nez probablement fracturé. Nola n'était pas blessée mais sa jolie robe du dimanche était piteusement déchirée sur toute la longueur laissant deviner de longues et charmantes jambes gainées de soie. Henri avait rapidement pris les choses en main, rampant sur le sol accidenté, il avait empoigné Nola pour l'entrainer en haut du talus. Nola avait l'impression d'être une poupée de chiffon, elle laissa Henri la guider vers la lumière pour finir par s'évanouir dans les bras d'un villageois venu prêter main forte aux
En bas l'incendie faisait rage. Les passagers étaient prisonniers, comme à chaque voyage les voitures avaient été fermées à clé de l'extérieur avant le départ du train. Henri s'était dit que c'était une bonne chose au regard du nombre de jeunes enfants présents dans le train qui pouvaient échapper au contrôle de leur parent et tenter d'ouvrir une porte pour regarder dehors. Les enfants ne sont ils pas curieux au-delà de toute attente.
L'air qui embaumait les fleurs et le bonheur quelques heures auparavant était maintenant devenu brûlant. Après la panique générale, le désastre se fit jour : le feu s’était communiqué à l’amas de voitures brisées, favorisé par l'enduit de peinture, les malheureux victimes déjà à moitié asphyxiées, se débattaient au milieu des débris. Les unes couvertes de sang, les autres brûlées par la vapeur s'échappant des chaudières éventrées, couraient dans tous les sens comme pour échapper à leur douleur, tandis que de plus infortunées périssaient consumées dans les flammes, sans qu’il soit possible qu'on leur porta secours. L'incendie ne fut maîtrisé qu'à neuf heures du soir, laissant derrière lui une vision proche de l'enfer.
Quarante-trois personnes périrent dans l'accident, neuf moururent de leurs blessures les jours suivants et l'on compta plus d'une centaine de blessés graves.
Nola ne reprit jamais le train depuis ce funeste jour de mai. Henri qui était journaliste participa à une importante campagne de presse contre les chemins de fer.
Une chapelle blanche en pierre de taille fut bâtie à proximité immédiate de la catastrophe quelques mois après en mémoire des victimes et inaugurée le 16 novembre 1842 par l'évêque de Versailles.
Pendant presque cinquante après la catastrophe, chaque 8 mai à 18h, Nola et Henri vinrent déposer un bouquet de fleurs des champs au pied de « Notre Dame des Flammes » en souvenir de leur innocence partie en fumée.
Invité- Invité
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Histoire triste qui ressemble à un drame d'il y a quelques années : Flaugeac dans le Lot
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Je ne connaissais pas ce drame. J'ai donc interrogé Mr Google pour en savoir un peu plus. Je n'imaginais pas que les trains pouvaient rouler à + de 40km/heure à l'époque, c'est le détail qui m'a poussé à aller m'informer sur cette affaire. Je n'ai trouvé qu'une vague réponse: le train roulait à 30km/h en 1830 puis pouvait monter à 100km/h en 1850. Mais je suis sûre que notre spécialiste, Trainmusical pourra sans doute nous en dire un peu plus.
Ce texte est donc une belle surprise car il relate un fait divers réel et qui remonte aux premiers frémissement de nos transports ferroviaires. C'est d'autant plus intéressant
Tu as oublié 2 mots il me semble, et une petite erreur ici:
on ne dit pas Sans crier garde mais Sans crier gare
J'ai retrouvé un dessin représentant cette tragédie, je la mets en dessous.
Ce texte est donc une belle surprise car il relate un fait divers réel et qui remonte aux premiers frémissement de nos transports ferroviaires. C'est d'autant plus intéressant
Tu as oublié 2 mots il me semble, et une petite erreur ici:
on ne dit pas Sans crier garde mais Sans crier gare
J'ai retrouvé un dessin représentant cette tragédie, je la mets en dessous.
Dernière édition par Admin le Dim 12 Oct - 18:05, édité 1 fois
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
En même temps que je lis avec plaisir un texte bien écrit, je découvre cette histoire. Tu as eu là une très bonne idée KO !
Invité- Invité
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Un plaisir a lire, et en meme temps une histoire que je ne connaissais pas non plus. Bravo
Myriel- Kaléïd'habitué
- Humeur : Girouette
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Merci pour cette narration historique sous forme d'un texte qui à son début, est parfumé de poésie et d'innocence et ensuite raconte avec précision l'incendie et l'accident.
Bravo !
Bravo !
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
En lisant ton texte je me demandais si tu racontais un fait réel, tellement ta description est précise et détaillée. Il semble donc bien que oui et c'est une excellente idée.
Par contre j'ai été un peu génée par des phrases très longues. A mon avis elles mériteraient d'être coupées en 2 ou 3 phrases pour faciliter leur lecture. Et si tu te relis tu verras quelques fautes d'inattention.
Par contre j'ai été un peu génée par des phrases très longues. A mon avis elles mériteraient d'être coupées en 2 ou 3 phrases pour faciliter leur lecture. Et si tu te relis tu verras quelques fautes d'inattention.
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Je découvre aussi ton histoire, sûrement une des premières catastrophe ferroviaire de l'époque "moderne".
Le 08 mai m'a aussi interpelée, c'est curieux, cette date semble attirer les évènements...
Le 08 mai m'a aussi interpelée, c'est curieux, cette date semble attirer les évènements...
silhène- Kaléïd'habitué
- Humeur : la meilleure possible....
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Un texte qui intègre habilement deux personnages de fiction à un fait divers historique. Bien raconté et bien écrit et on sent la patte du peintre dans certains passages.Seule remarques : deux redondances sans doute dues à l’inattention :
se persuader qu'il fallait devoir reprendre
Nola qui avait presque failli s'évanouir
se persuader qu'il fallait devoir reprendre
Nola qui avait presque failli s'évanouir
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Félicitations KO69150 pour ce magnifique texte ludique et émouvant en même temps. Moi-même je n'étais pas au courant de cet accident, et en consultant Mr. Google, je suis impressionné par les détails que tu as mentionnés, quel beau travail de recherche.
Je pense possible que ce train pouvait circuler à 40km/h, car je sais qu'en 1829, la Rocket de Stephenson a atteint le record de 48 Km/h. lors d'un concours.
Ce qui me pousse aussi à dire que c'est possible c'est que les vitesses des trains furent sujet à polémiques. Dans ce blog j'ai lu ceci:
« En 1835, les membres de l’académie de médecine de Lyon demandèrent solennellement : ne risquerons-nous pas des atteintes à la rétine et des troubles de la respiration à grande vitesse, les femmes enceintes ballottées ne vont-elles pas faire des fausses couches1 ? » L’histoire permet de ridiculiser les anxiétés par une sorte de récurrence technophile : tout comme les craintes passées nous semblent absurdes, les craintes actuelles sembleront ridicules à nos descendants.
Mais plus je ne peux pas répondre, si j'en apprends, je vous dirai.
Merci Admin, mais je ne suis pas si spécialisteAdmin a écrit:Je n'imaginais pas que les trains pouvaient rouler à + de 40km/heure à l'époque, c'est le détail qui m'a poussé à aller m'informer sur cette affaire. Je n'ai trouvé qu'une vague réponse: le train roulait à 30km/h en 1830 puis pouvait monter à 100km/h en 1850. Mais je suis sûre que notre spécialiste, Trainmusical pourra sans doute nous en dire un peu plus.
Je pense possible que ce train pouvait circuler à 40km/h, car je sais qu'en 1829, la Rocket de Stephenson a atteint le record de 48 Km/h. lors d'un concours.
Ce qui me pousse aussi à dire que c'est possible c'est que les vitesses des trains furent sujet à polémiques. Dans ce blog j'ai lu ceci:
« En 1835, les membres de l’académie de médecine de Lyon demandèrent solennellement : ne risquerons-nous pas des atteintes à la rétine et des troubles de la respiration à grande vitesse, les femmes enceintes ballottées ne vont-elles pas faire des fausses couches1 ? » L’histoire permet de ridiculiser les anxiétés par une sorte de récurrence technophile : tout comme les craintes passées nous semblent absurdes, les craintes actuelles sembleront ridicules à nos descendants.
Mais plus je ne peux pas répondre, si j'en apprends, je vous dirai.
trainmusical- Occupe le terrain
- Humeur : à vous de juger :-)
Re: Un dimanche 8 mai 1842.
Je ne connaissais pas non plus cette histoire, mais tu nous renseigne à merveille. Comme Tober, j'ai ressenti la pâte du peintre en te lisant.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
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