La raison tonne en son cratère

-Elle (La journaliste de Kaléido) : Bonjour Sochard
-Moi (dit "Sochard" sur le forum) : Bonjour copine journaliste
-Copine? Pourquoi "Copine"? On ne se connait pas.
-Si j'avais dit "Salutations révolutionnaires, camarade journaliste" , ça aurait fait fuir la plupart des lecteurs; mais le cœur y est.
-Vous n'intervenez pas souvent sur le forum. Pourquoi? Vous n'avez donc rien à dire?
-Au contraire. Ecrire est difficile. ça me prend un temps fou. Et j'ai l'impression que ce que je pourrais dire est trop décalé pour être entendu, voire écouté, voire compris.
-Un peu comme les surréalistes en leur temps, par exemple?
-Par exemple!
-Mais aujourd'hui, vous avez envie de vous exprimer.
-Oui, ce n'est pas possible de se taire.
-Vous avez l'air en colère...
-Je ne sais pas par quoi commencer. On me demande de rendre hommage à l'abbé Pierre.
C'est trop facile. Évidemment, on ne peut qu’être admiratif. Il a consacré sa vie aux autres et les gens comme lui sont trop rares et précieux. Alors rendons hommage à ce grand homme dont j'ai regretté de ne pouvoir assister aux obsèques; ainsi qu'à son appel du 1er février 54.
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-Bon, ça c'est fait... et maintenant?

-Rendons hommage à tous ceux qui ont lutté pour en finir avec une société qui accumule la richesse à une extrémité et la pauvreté à l'autre extrémité.
-A qui pensez vous?
-Aux militants, bien sur. A tous ceux qui militent pour une société réellement fraternelle et humaine; un monde débarrassé des frontières, de la misère et de l'exploitation....
-Ouai, c'est banal. Sarkosy promettait bien plus personne à la rue dans 2 ans.
-Oui, et il a invité des types comme Khadafi ou Bachar el Assd invité d'honneur au défilé d'un 14 juillet.
-Vous n'etes pas un peu utopique, là?
-Non, l'utopique, c'est celui qui croit que notre société a un avenir. Il y a des périodes de progrès et des périodes de recul dans l'histoire de l'humanité. Le passage au néolithique a été un progrès.
L'avènement du capitalisme en son temps a été facteur de progrès sur de nombreux plans.
Aujourd'hui, on n'en est plus là. Des sommes colossales de capitaux ne savent pas où s'investir et vont se perdre en spéculation financière. On consacre aussi une part de la créativité humaine à l'armement, à toutes sortes de drogues licites ou non, audiovisuelles ou non...
Les jeux olympiques, le foot à la télé, ça a l'air anecdotique. Mais je trouve que ça fait "opium du peuple".
-Qu'est ce que vous voudriez alors? A la télé par exemple?
-Non pas qu'on interdise ce qui est vain, voire débile; mais qu'on favorise ce qui vaut le coup d'être apprécié.
Le bon gout ne va pas de soi, vous savez.
Mais favoriser la pensée intelligente - je veux dire "la pensée" tout simplement, c'est aussi favoriser la pensée critique.
Et alors que le capitalisme se survit à lui-même de crise en crise et plonge une par toujours croissante des populations dans le désarroi, les classes privilégiées et dirigeantes de la société ne feront rien dans ce sens.
Ils ont peur des crève-la-fin. Ils les méprisent et en même temps ils en ont peur.
C'est pour ça que l'abbé Pierre, ou Martin Luther King sont mis en avant.
Parce que ces gens là ne remettent pas en cause la société.
Ils n'appellent pas la classe ouvrière, la seule classe qui n'a pas intérêt à s'opprimer elle-même, la seule classe porteuse d'avenir, à prendre le pouvoir politique.
-Vous parlez comme ça, mais on vit en démocratie, il y a bien des élections.
-Oui, et c'est tant mieux Nous n'imaginons pas la chance que nous avons de vivre en régime parlementaire.
-Non, j'ai dit "démocratie"
-Tout est relatif, vous savez. Une démocratie qui interdit à quelqu'un de voter sous prétexte qu'il n'a pas la nationalité n'est pas tellement démocratique.
Et puis, les élus devraient être révocables à tout moment.
Et puis la réalité du pouvoir n'est pas au parlement mais dans les conseils d'administration de compagnies capitalistes souvent plus puissantes que de grands états...
Elle, lui coupant la parole: -décidément, on ne vous arrête pas, à vous!
-Non, rien n'arrête mon rouleau compresseur. Sauf, peut être la panne de gas-oil.
-Et bien merci, copain. On va en rester là pour ce soir.
-De rien, copine!
-Au fait, qu'est ce que c'est que cette chanson grecque qui illustre votre intervention?
-C'est "La marche de Boudienny"
-Boudienny? Qu'est ce que c'est?
-D'abord, je n'ai pas trouvé de version française sur Youtube. Ensuite, Hier matin à "Concordance des temps" sur France-Culture, on a diffusé une émission sur l'histoire de l'Ukraine, en particulier au moment de la révolution et des famines causées par la politique criminelle de Staline.
L'invité évoque la république libertaire de Makhno, mais aussi les pogroms commis à cette époque.
Il dit très succinctement  que ce sont les bolchéviks de Boudienny qui ont mis fin à ces atrocités. A cet effet, lisez donc "Cavalerie rouge" de Isaac Babel.
Et il dit que c'est une page de l'histoire passée sous silence. Tiens donc!

-Vous pensez que vous serez de nouveau invité sur ce forum?
-Ha ha ha!, je suis cramé, là! Je vais me faire rentrer dans le lard, voire exclure, c'est sur!





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Un texte agréable à lire, avec du souffle. La forme de l'interview donne un ton original au texte. Bref, on se laisse porter et on va jusqu'au bout sans avoir focément tout compris de l'argumentaire, mais ce n'est pas le plus grave !   

Kz a écrit:Bref, on se laisse porter et on va jusqu'au bout sans avoir focément tout compris de l'argumentaire, mais ce n'est pas le plus grave !   

Merci KZ!
Oui, c'était le problème; il aurait fallu développer quasiment à l'infini. Chaque mot écrit est comme une porte qui ouvre sur d'autres portes qui à leur tour etc...

Une interview qui touche à de nombreux problèmes de notre société et d'ailleurs... Le "copain" ne mâche pas ses mots. Le texte sera-t-il publié dans son intégralité ?
Intéressant, en tout cas.

Maïna a écrit:Une interview qui touche à de nombreux problèmes de notre société et d'ailleurs... Le "copain" ne mâche pas ses mots. Le texte sera-t-il publié dans son intégralité ?
Intéressant, en tout cas.

Hé bien, Maïna, c'est vrai que ce sujet de la misère ne peut pas nous laisser indifférents. En questionnant cet horrible fait qu'une femme morte de froid, on questionne tellement de choses. Qu'est ce que c'est que cette société? Que puis-je faire? Pourquoi les choses sont elles ainsi? Pourquoi pas un monde au service des pauvres? etc...
Je n'avais pas envie de parler de l'abbé Pierre (même si je l'admire).
Beaucoup de gens consacrent de leur temps libre et de leur argent à soulager la misère. On a tous donné aux restos du coeur, par exemple.
Mais il arrive que l'engagement soit celui de toute une vie...!... dans ce qui n'est pas forcément spectaculaire... Un petit travail de fourmi, dirons nous!

Le texte sera-t-il publié dans son intégralité ?, demandez vous.
Non.
Je vais bètement répéter Lacan (aussi digne d'hommage que l'abbé Pierre):
"Je dis toujours la vérité! Pas toute la vérité! La dire toute, ce n'est pas possible..."

Sochard a écrit:-Vous pensez que vous serez de nouveau invité sur ce forum?
-Ha ha ha!, je suis cramé, là! Je vais me faire rentrer dans le lard, voire exclure, c'est sur!

Etant la seule à "pouvoir" exclure, et, en 6 ans d'existence n'ayant jamais utilisé "ce pouvoir" et donc, cette petite pique que je sais volontaire ayant bien atteint son but, c'est à dire me toucher, je ne commenterai pas le reste de ton texte.

Maïna a écrit:Le texte sera-t-il publié dans son intégralité ?

Quand je disais cela, je ne pensais pas à Kalé mais au journal ou à la revue à l'initiative de l'interview....  

Admin a écrit:
Etant la seule à "pouvoir" exclure, et, en 6 ans d'existence n'ayant jamais utilisé "ce pouvoir" et donc, cette petite pique que je sais volontaire ayant bien atteint son but, c'est à dire me toucher, je ne commenterai pas le reste de ton texte.

Allons allons...
Si j'ai la prétention de "toucher" les gens, c'est en m'adressant à ce qu'il y a de meilleur en eux.
Quelque fois, je suis dans le sérieux et de suite après dans la déconade et l'exagération.
Evidemment, vous ne pouviez pas le deviner. C'est moi qui ai été maladroit.
Je n'aime pas faire mal, ni envoyer des piques imméritées.
Je m'aperçois que plus les années passent, plus on est sensible.
On ne mesure pas toujours l'effet des mots. La parole est bénéfique ou dolosive au delà de ce que l'on pense.
Enfin, je citerai le mot de Lacan (encore lui!) à propos du divan; il parlait du dire-vent. Autrement dit, il ne faut pas accorder tellement d'importance à ce qui est dit. Souvent, c'est du vent.

Dans la tradition des dialogues philosophiques, une pseudo interview prétexte à faire passer des idées de façon plus digeste que dans un discours et avec quelques pointes d’humour.
Khadafi, n’était-ce pas un SDF ? Il me semble qu’il plantait sa tente ici et là, dont une fois du côté de l’Élysée…
Et l’Abbé Pierre serait-il « l’idiot utile » du capitalisme ( pour reprendre la terminologie marxiste)
Au fait à quelle heure est-ce qu’elle passe à la télé, cette interview ?