A. L’espion qui venait d’hier
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A. L’espion qui venait d’hier
Il était là, il m’attendait, debout sur le trottoir, les mains dans les poches de son par-dessus droit. La rue baignait dans une clarté bleutée émanant de l’enseigne du bar « Au Blue Diamond » qui était désert ce soir là. Il faut dire qu’il était presque minuit, heure de la fermeture.
Ce qui me surprit chez lui fut son air de relative jeunesse, pas plus de quarante cinq ans, et son extrême élégance. A vrai dire, une élégance d’un autre âge avec le foulard de soie bleu franc soigneusement glissé dans l’encolure de son manteau et assorti au large ruban de son chapeau noir. L’ombre du bord de celui-ci m’empêchait de distinguer son regard.
« Vous prendrez bien quelque chose ? » me dit-il, en se tournant vers la porte du bar.
J’alléguais que c’était l’heure de la fermeture et qu’il n’était pas prudent que l’on nous voit longtemps ensemble, mais il avait déjà poussé la porte. Je le suivis donc à l’intérieur du bouiboui et nous nous installâmes dans un coin de la salle. Il ne se présenta personne pour prendre notre commande et cela m’arrangeait plutôt.
J’attendais qu’il me remette ce pourquoi j’étais là, à savoir un document top secret sous forme d’une clé USB, contenant des révélations sur un important réseau d’espions russes infiltrés en Europe et qui intéressait fort les services auxquels j’appartenais.
Il sortit de sa poche une carte routière passablement fatiguée qu’il étala sur la table et une pellicule photo comme je n’en n’avais pas vue depuis des lustres. Devant mon air surpris, il les poussa vers moi et, de l’index, m’indiqua un point sur la carte.
Mon visage devait n’être qu’un immense point d’interrogation, car il précisa : « Là ! »
-Quoi là ?
-La cabine téléphonique.
- Qu’est-ce que je pourrais bien … faire d’une cabine téléphonique ?
-Pour les appeler, dit-il avec un air d’impatience.
-Plus personne ne téléphone à partir d’une cabine aujourd’hui, d’où sortez-vous ?
-Il y a un Minitel dans ce bar ?
- Un Minitel ? Et pourquoi pas un télégraphe Chappe ou même un téléphone à ficelle ? Je rêve… Voilà mon mobile appelez-les vous-même ! »
Je commençais à en avoir par-dessus la tête de cet olibrius et il me tardait d’en finir.
« Vous devez me remettre une clé USB, ce n’est pas compliqué, où est-elle ? Je vous préviens : pas de clé, pas d’argent ! »
Au mot « argent » son regard s’alluma mais s’éteignit aussitôt.
« Je n’ai pas de clé dit-il, d’ailleurs il n’y a rien à ouvrir, ce que vous voulez est sur la pellicule… mais avant que vous puissiez la prendre, il faut me donner le mot de passe et que je le communique à Boris. »
Je ne comprenais rien à son histoire. Qui était Boris ? De quel mot de passe s’agissait-il ? Je commençais à me demander s’il ne se payait pas ma tête, histoire de gagner du temps.
« Prenez mon téléphone et appelez-le votre Boris, je ne comprends rien à votre histoire.
-Je peux avoir un annuaire ici ?
-Un annuaire ?????????? Vous ne connaissez pas le numéro ? De vos propres services ? Mais d’où sortez-vous ? »
Il baissa la tête
« Je crois que Boris n’avait pas tort… je ne suis pas encore vraiment opérationnel. J’aurais dû suivre les séances du R.R.R des Services Spéciaux… J’ai voulu revenir tout de suite dans le service, mais tout est nouveau pour moi, je suis désolé…
-R.R.R. ?
- Redressement et réadaptation en vue de réorientation. J’aurais dû comprendre qu’après vingt ans de confinement dans les services du Dr Stropanov, spécialiste du reconditionnement psychologique des anciens agents de renseignement, j’aurais besoin de temps pour retrouver mon niveau d’avant… »
A cet instant, la porte du Blue Diamond s’ouvrit avec fracas. Trois hommes en manteau gris firent irruption dans la pièce, l’un d’eux portait une longue blouse blanche sous son manteau. Ils ceinturèrent mon interlocuteur et, malgré ses protestations, l’entraînèrent dehors. Des portières claquèrent et une voiture démarra en trombe… Le chapeau au ruban bleu était tombé sur le sol.
Je le ramassais et machinalement m’en coiffais… Je me demandais ce que j’allais bien pouvoir raconter à mes supérieurs. Il fallait que je réfléchisse…
D’accord, je n’avais pas la clé USB, mais j’avais toujours l’épaisse enveloppe brune garnie de billets…
« Disparais ! » me souffla le chapeau.
Ce qui me surprit chez lui fut son air de relative jeunesse, pas plus de quarante cinq ans, et son extrême élégance. A vrai dire, une élégance d’un autre âge avec le foulard de soie bleu franc soigneusement glissé dans l’encolure de son manteau et assorti au large ruban de son chapeau noir. L’ombre du bord de celui-ci m’empêchait de distinguer son regard.
« Vous prendrez bien quelque chose ? » me dit-il, en se tournant vers la porte du bar.
J’alléguais que c’était l’heure de la fermeture et qu’il n’était pas prudent que l’on nous voit longtemps ensemble, mais il avait déjà poussé la porte. Je le suivis donc à l’intérieur du bouiboui et nous nous installâmes dans un coin de la salle. Il ne se présenta personne pour prendre notre commande et cela m’arrangeait plutôt.
J’attendais qu’il me remette ce pourquoi j’étais là, à savoir un document top secret sous forme d’une clé USB, contenant des révélations sur un important réseau d’espions russes infiltrés en Europe et qui intéressait fort les services auxquels j’appartenais.
Il sortit de sa poche une carte routière passablement fatiguée qu’il étala sur la table et une pellicule photo comme je n’en n’avais pas vue depuis des lustres. Devant mon air surpris, il les poussa vers moi et, de l’index, m’indiqua un point sur la carte.
Mon visage devait n’être qu’un immense point d’interrogation, car il précisa : « Là ! »
-Quoi là ?
-La cabine téléphonique.
- Qu’est-ce que je pourrais bien … faire d’une cabine téléphonique ?
-Pour les appeler, dit-il avec un air d’impatience.
-Plus personne ne téléphone à partir d’une cabine aujourd’hui, d’où sortez-vous ?
-Il y a un Minitel dans ce bar ?
- Un Minitel ? Et pourquoi pas un télégraphe Chappe ou même un téléphone à ficelle ? Je rêve… Voilà mon mobile appelez-les vous-même ! »
Je commençais à en avoir par-dessus la tête de cet olibrius et il me tardait d’en finir.
« Vous devez me remettre une clé USB, ce n’est pas compliqué, où est-elle ? Je vous préviens : pas de clé, pas d’argent ! »
Au mot « argent » son regard s’alluma mais s’éteignit aussitôt.
« Je n’ai pas de clé dit-il, d’ailleurs il n’y a rien à ouvrir, ce que vous voulez est sur la pellicule… mais avant que vous puissiez la prendre, il faut me donner le mot de passe et que je le communique à Boris. »
Je ne comprenais rien à son histoire. Qui était Boris ? De quel mot de passe s’agissait-il ? Je commençais à me demander s’il ne se payait pas ma tête, histoire de gagner du temps.
« Prenez mon téléphone et appelez-le votre Boris, je ne comprends rien à votre histoire.
-Je peux avoir un annuaire ici ?
-Un annuaire ?????????? Vous ne connaissez pas le numéro ? De vos propres services ? Mais d’où sortez-vous ? »
Il baissa la tête
« Je crois que Boris n’avait pas tort… je ne suis pas encore vraiment opérationnel. J’aurais dû suivre les séances du R.R.R des Services Spéciaux… J’ai voulu revenir tout de suite dans le service, mais tout est nouveau pour moi, je suis désolé…
-R.R.R. ?
- Redressement et réadaptation en vue de réorientation. J’aurais dû comprendre qu’après vingt ans de confinement dans les services du Dr Stropanov, spécialiste du reconditionnement psychologique des anciens agents de renseignement, j’aurais besoin de temps pour retrouver mon niveau d’avant… »
A cet instant, la porte du Blue Diamond s’ouvrit avec fracas. Trois hommes en manteau gris firent irruption dans la pièce, l’un d’eux portait une longue blouse blanche sous son manteau. Ils ceinturèrent mon interlocuteur et, malgré ses protestations, l’entraînèrent dehors. Des portières claquèrent et une voiture démarra en trombe… Le chapeau au ruban bleu était tombé sur le sol.
Je le ramassais et machinalement m’en coiffais… Je me demandais ce que j’allais bien pouvoir raconter à mes supérieurs. Il fallait que je réfléchisse…
D’accord, je n’avais pas la clé USB, mais j’avais toujours l’épaisse enveloppe brune garnie de billets…
« Disparais ! » me souffla le chapeau.
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Magnifiquement écrit dans le style pur polar !
Myrte- Kaléïd'habitué
- Humeur : Curieuse
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Un vrai polar...plein d'idées géniales!
Zéphyrine- Modératrice écriture libre
- Humeur : Méditerranéenne
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Ce loustic qui travaillait du chapeau
n'aurait-il pas fait un passage aux PTT à la belle époque
où la France s'enorgueillissait de sa trouvaille : le Minitel !
L'histoire ne nous dit pas si les sbires en blouse blanche
ne l'ont pas enfermé dans une cabine téléphonique
afin qu'il apprenne par coeur tous les noms commençant par R...
Joli polar avec un brin de nostalgie pour des instruments qu'on a abandonné comme des vieilles chaussettes
n'aurait-il pas fait un passage aux PTT à la belle époque
où la France s'enorgueillissait de sa trouvaille : le Minitel !
L'histoire ne nous dit pas si les sbires en blouse blanche
ne l'ont pas enfermé dans une cabine téléphonique
afin qu'il apprenne par coeur tous les noms commençant par R...
Joli polar avec un brin de nostalgie pour des instruments qu'on a abandonné comme des vieilles chaussettes
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Histoire intéressante et fort bien construite. Bravo
Ataraxie- Kaléïd'habitué
- Humeur : changeante
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Minutieusement construite cette histoire pleine de rebondissements et une chute pas très honnête....
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Déjà, j'ai beaucoup aimé le titre…
et l'histoire est bien construite. On a envie d'aller au bout sans ennui…
je propose 100 000 $ pour l'adaptation au cinéma.
De toute façon c'est du blé que j'ai volé… y'a pas de risque !
et l'histoire est bien construite. On a envie d'aller au bout sans ennui…
je propose 100 000 $ pour l'adaptation au cinéma.
De toute façon c'est du blé que j'ai volé… y'a pas de risque !
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: A. L’espion qui venait d’hier
Le pauvre a besoin d'une sacrée remise à niveau effectivement ! Sympa le mélange des technologies de deux âges différents
Martine27- Kaléïd'habitué
- Humeur : Carpe diem
A. L'espion qui venait d'hier
Une atmosphère digne des grands maîtres du genre, le suspense garanti jusqu'à la fin du récit dans le style du pur polar. On frissonne en quelques lignes. Quel talent !
Chloé- Occupe le terrain
- Humeur : rêveuse
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