L'homme en rouge

Dans la rue sur mon passage,
Le peuple s’écarte, me fuit,
A ses yeux, signe de mauvais présage,
Je porte le rouge sur mes habits.
Vous m’appelez le tourmenteur, le sanglant,
Vous me frappez du sceau de l’infamie,
Vous oubliez que ce sont vos lois, votre argent,
Qui ont fait de moi ce que je suis.

                                                                   
C’est au gibet de Montfaucon,
Que je mène se balancer au bout d’une corde,
Voleurs, brigands et larrons,
Pour qu’en Paris règne enfin l’ordre.
Mendiant, croyez en mon expérience,
Restez cachés en la cour des miracles,
Sinon j’userai de toute ma science,
Pour faire de vous le clou de mon spectacle.

                               

Et toi sorcière, prêtresse de Satan,
Tu as confessé tes crimes de magie noire,
En place de Grève le bûcher t’attend
Y bouter le feu sera mon moment de gloire.
Longue sera ton agonie,
Pour le bonheur de la populace,
Douce musique seront tes cris,
Si au nom de Dieu tu demandes grâce.

                               

Hérétiques ou traîtres au Roi,
Je vous soumets tous à la question,
La torture n’est pas mon choix,
C’est un attribut de ma fonction.
Ecartelés ou décapités tel sera leur sort,
En enfer leur châtiment sera éternel
Alors que moi, en toute justice je verrais à ma mort,
S’ouvrir pour mon âme les portes du Ciel.

                               


Hélas Guillotin m’a assassiné,
Avec sa machine infernale,
Adieu la noblesse de mon métier
Il ne reste qu’exécution banale.
L’honneur de ma famille est bafoué,
Je ne peux plus vivre de mon état,
J’ai du ranger hache et épée,
Il n’y a plus de bourreau du Roi.

J'adore, enlevé, ryhtmé et décalé, il manque la musique et la fête commence.

Brrrr...  L'a bien fait de disparaitre çui-là !!!

Mais, force est de reconnaitre  à la complainte de l'exécuteur des hautes (?   ) oeuvres, un rythme soutenu   qui n'en fait pas un homme fréquentable à l'inverse  de Myriel qui manie rimes , refrain et couplets avec la plus grande dextérité ...

Très travaillé, très cadencé, bien mené. Bravo Myriel !
Le titre m'a interpellée : je ne savais pas que le bourreau était vêtu de rouge. Je savais seulement que son pain était tourné à l'envers dans les boulanges. Ce qui fait dire encore aujourd'hui qu'il faut  poser le pain à l'endroit sur la table car sinon le malheur nous guette.
Un métier qui n'engendre pas la nostalgie en tout cas !

Très instructif, très bien construit, original !

Yvanne, aussi merci pour l'info, je ne connaissais pas l'origine de cette coutume

Très belle "chanson" dans le style du Moyen Age sur la charge de bourreau. Ton allusion au gibet de Montfaucon m'a fait penser à la célèbre "Ballade des Pendus" de François Villon.

Excellente chanson, Myriel ! Bien écrite, bien composée et bien documentée en plus. Ce bourreau, exécuteur des basses œuvres de la société, fait froid dans le dos, avec sa conscience professionnelle et sa certitude d'aller au paradis. Ses lamentations du dernier couplet ( couplet, pas couperet...) et ses propos sur la noblesse du métier sont d'un humour très grinçant. Quand on pense que la guillotine, pourtant déjà bien effrayante, provenait d'un souci humanitaire...

Bien trouvé, je n'y aurais jamais pensé!!!!!
Très bien écrit Myriel, bravo

Merci a tous pour vos commentaires

Voilà qui est fort bien écrit et très travaillé. J'espère moi aussi que nous ne connaîtrons plus jamais de version actualisée de cette profession.

Escandelia écrit :

J'espère moi aussi que nous ne connaîtrons plus jamais de version actualisée de cette profession.

Il y  a les chasseurs de têtes , mais à ma connaissance, ils ne les font pas tomber, une fois utilisées, quoique !!!