Retour aux origines.

Je me sens toujours plus seul quand il fait froid, et ici, pour les immigrés comme moi de la planète Mars, l'accueil est glacial. Comme les autres, je suis victime de la « préférence planétaire », instituée au siècle dernier par l'extrême droite, qui désormais régente la Terre.

Ce sont mes arrière-grands-parents qui partirent pour Mars, coloniser cette planète  d'espérance, alors que l'air terrien devenait irrespirable, au sens propre, comme au sens figuré. La descendante lointaine de Farine Le Ben avait fini par accéder au pouvoir suprême et international, après les guerres fratricides qui avaient fait plus d'un milliard de morts sur la planète en quelques semaines. C'est pour ne pas être exterminé que mes arrière-grands-parents avaient pu embarquer sur l'une des dernières navettes vers Mars.

Désormais le drapeau Blanc Farine avait étendu son règne partout. Avant ce blanc était le signe des armistices, prémices de paix, des pourparlers pour aboutir à des compromis acceptables, il était signe de la bonne volonté des humains.
Aujourd'hui il dessine la terreur d'extrémistes qui s'imposent toujours et partout.

Devenu adulte, malgré tous les échos négatifs qui nous arrivaient de là-bas par quelques voyageurs solitaires, quelques bricoleurs de génie spatial, quelques audacieux qui se cachaient dans les soutes de navettes de ravitaillement, j'ai voulu retrouver la Terre de mes ancêtres, et me voici en zone d'attente dans le "Spatiodrome Marion La Ben" ou je me gèle les miches comme jamais encore.

Croyez-moi, sur Mars c'est loin d'être la panacée. Atteindrons-nous un jour les succès qui ont existé il y a bien des siècles sur Terre lorsque des émigrants européens s'en allaient conquérir l'Amérique ? Ici, c'est toujours le désert, et la petite colonie des survivants reste dépendante des navettes automatiques Terre/Mars et retour, qui nous amènent sporadiquement de piètres nourritures. Alors chaque unité parafamiliale combat sa voisine pour un peu plus de bouffe, sous le regard amusé des milices terriennes, toujours prêtes à massacrer quelques-uns d'entre nous. Quitte à tout perdre, j'ai donc décidé de tenter une retour sur Terre. Et me voici dans ce hangar venteux, à moitié nu, aspergé de désinfectants, à attendre le bon vouloir des autorités.

Nous sommes des centaines dans ce hangar. Tout à coup les trappes de ventilation se ferment. L'obscurité se fait. Nous sommes pris de vomissements. Certains s'affaissent déjà. Je résisterai. Oui, je résisterai, je suis fort, très fort….

Excellent texte Alainx. Je ne lui trouve aucun défaut, c'est dire. Et la fin fait froid dans le dos.
Tu as su sous-entendre sans accuser, faire des références sans nommer, bref, je suis admirative   

A la noirceur du texte qui me rappelle "le talon de fer" de Jack London, succède une conclusion porteuse d'espoir : oui, les Humains sont forts, très forts dans l'adversité.

Mais , il serait temps, bien temps de s'y mettre !

Quelle force dans ce dramatique texte.
  

Il percute ton texte, et sa description d'un monde sans espoir, est terrifiante.
L'être humain de ton histoire est loin de s'être amélioré au cours des siècles   

En un mot :   

J'espère que mon histoire est une ereur totale !
et que nos arrières-arrières-arrières-arrières-arrières-petits enfants nageront dans le bonheur !!

  

Une transposition de notre monde actuel en encore plus noir, avec une grosse pointe de satire. n'empêche, si on doit rapatrier ces immigrés chez eux en navette-charter, ça va couter cher au contribuable !

Après avoir lu ton texte qui pourrait figurer dans "Les Chroniques Martiennes", les nombreux volontaires qui se proposent pour la mission Mars One devraient revoir leur décision. Il est vrai que d'ici 2025, les vrais Martiens nous aurons peut-être colonisés, alors Farine le Ben n'a plus qu'à bien se tenir !   

Un texte en guise d'avertissement ? J'espère que cela n'arrivera jamais, comme tu dis, mais parfois la ficrion rejoint la réalité brrr