Naissance d’une vocation
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Naissance d’une vocation
Tous ceux qui se souviennent de Nola diront que c’était une jeune fille merveilleuse. Fille de riches soyeux de la Croix Rousse, elle parcourait les traboules d’un pas dansant, ses cheveux noirs flottant sur ses épaules. Son corps ondulait avec grâce et du haut de ses 17 ans elle faisait tourner la tête à nombre de garçons. Il se racontait qu’elle était promise au jeune André, le fils d’une autre famille de soyeux.
Oui ! Tous ceux qui se souviennent de Nola diront que c’était une fille merveilleuse. Jusqu’à ce 28 septembre 1937.
Ce jour là Nola accompagna son père vendre des étoffes à Vassieux en Vercors. Le train était déjà en gare quand ils arrivèrent sur le quai. A peine ont-ils eu le temps de monter dans le wagon, que la locomotive démarra dans un nuage de vapeur et de longs sifflements actionnés par le chef mécanicien.
Nola aimait ces voyages en train au travers des profondes forêts du Vercors. Penchée à la fenêtre, elle en humait l’odeur toujours différente selon la saison. Elle aimait cette lente traversée rythmée par le bruit des essieux sur les rails. Elle faisait corps avec la locomotive quand celle-ci peinait dans les montées et crachait des tonnes de vapeur.
A Vassieux en Vercors la journée fut profitable à Nola et son père. Ils reprirent le train de 15H12 pour une arrivée à Lyon à 18H35 mais ce soir là rien ne se passa comme prévu !
Au plus profond de la forêt de Lente la locomotive commença à ralentir pour finir par s’arrêter complètement. Les cheminots se massèrent autour du monstre d’acier l’auscultant attentivement. Une bielle s’était cassée et il faudrait plusieurs heures pour la réparer.
Les voyageurs prirent leur mal en patience, jouant aux cartes ou se dégourdissant les jambes le long du train.
La nuit commença à tomber, une nuit de pleine lune. C’est alors que tout autour d’eux la forêt s’anima. Des cris rauques et puissants s’élevèrent d’un peu partout. La plupart des voyageurs frémirent d’effroi. Jamais de leur vie ils n’avaient entendu de tels cris aussi inquiétants. Calmement un homme expliqua qu’il s’agissait du brame des cerfs et que cet endroit ci était le lieu où cerfs et biches se retrouvaient pour la période du rut à cette époque. Une explication qui ne les rassura pas pour autant !
Leur frayeur fut à son comble lorsqu’au loin un loup hurla à la mort. Là pas besoin d’explications ! Tout le monde rentra précipitamment dans le train terrifié et le cœur battant.
C’est alors que le père de Nola s’aperçut de l’absence de sa fille. Il la chercha dans tout le train puis sortit dehors avec plusieurs hommes pour l’appeler. Sans succès.
Nola revint 1/2 heure après, les yeux brillants : « P’pa c’était magnifique.. ». Ses mots s’étranglèrent dans sa gorge. Fou d’inquiétude et sous le choc de la peur, son père lui assena une gifle retentissante qui la fit chanceler en arrière.
Qu’avait elle vu ? Qu’est ce qui l’avait à ce point là marquée ? Personne ne le sut jamais. La panne réparée la fin du voyage se déroula dans un profond mutisme entre elle et son père. Celui-ci regrettait son geste mais ne savait comment revenir en arrière.
Après ce voyage Nola changea. Elle se referma sur elle-même. Quelques mois après elle quitta la maison familiale sans un regard en arrière.
Bien des années après, devenue une célèbre photographe animalière et alors qu’une journaliste lui demandait comment était venue sa passion, les yeux de Nola se mirent à briller :
« Cette nuit là au plus profond de la forêt de Lente. Ce cerf 8 cors qui bramait à quelques dizaines de mètres de moi. C’était si beau ! A la fois sauvage, primaire et tout simplement magnifique ! »
Oui ! Tous ceux qui se souviennent de Nola diront que c’était une fille merveilleuse. Jusqu’à ce 28 septembre 1937.
Ce jour là Nola accompagna son père vendre des étoffes à Vassieux en Vercors. Le train était déjà en gare quand ils arrivèrent sur le quai. A peine ont-ils eu le temps de monter dans le wagon, que la locomotive démarra dans un nuage de vapeur et de longs sifflements actionnés par le chef mécanicien.
Nola aimait ces voyages en train au travers des profondes forêts du Vercors. Penchée à la fenêtre, elle en humait l’odeur toujours différente selon la saison. Elle aimait cette lente traversée rythmée par le bruit des essieux sur les rails. Elle faisait corps avec la locomotive quand celle-ci peinait dans les montées et crachait des tonnes de vapeur.
A Vassieux en Vercors la journée fut profitable à Nola et son père. Ils reprirent le train de 15H12 pour une arrivée à Lyon à 18H35 mais ce soir là rien ne se passa comme prévu !
Au plus profond de la forêt de Lente la locomotive commença à ralentir pour finir par s’arrêter complètement. Les cheminots se massèrent autour du monstre d’acier l’auscultant attentivement. Une bielle s’était cassée et il faudrait plusieurs heures pour la réparer.
Les voyageurs prirent leur mal en patience, jouant aux cartes ou se dégourdissant les jambes le long du train.
La nuit commença à tomber, une nuit de pleine lune. C’est alors que tout autour d’eux la forêt s’anima. Des cris rauques et puissants s’élevèrent d’un peu partout. La plupart des voyageurs frémirent d’effroi. Jamais de leur vie ils n’avaient entendu de tels cris aussi inquiétants. Calmement un homme expliqua qu’il s’agissait du brame des cerfs et que cet endroit ci était le lieu où cerfs et biches se retrouvaient pour la période du rut à cette époque. Une explication qui ne les rassura pas pour autant !
Leur frayeur fut à son comble lorsqu’au loin un loup hurla à la mort. Là pas besoin d’explications ! Tout le monde rentra précipitamment dans le train terrifié et le cœur battant.
C’est alors que le père de Nola s’aperçut de l’absence de sa fille. Il la chercha dans tout le train puis sortit dehors avec plusieurs hommes pour l’appeler. Sans succès.
Nola revint 1/2 heure après, les yeux brillants : « P’pa c’était magnifique.. ». Ses mots s’étranglèrent dans sa gorge. Fou d’inquiétude et sous le choc de la peur, son père lui assena une gifle retentissante qui la fit chanceler en arrière.
Qu’avait elle vu ? Qu’est ce qui l’avait à ce point là marquée ? Personne ne le sut jamais. La panne réparée la fin du voyage se déroula dans un profond mutisme entre elle et son père. Celui-ci regrettait son geste mais ne savait comment revenir en arrière.
Après ce voyage Nola changea. Elle se referma sur elle-même. Quelques mois après elle quitta la maison familiale sans un regard en arrière.
Bien des années après, devenue une célèbre photographe animalière et alors qu’une journaliste lui demandait comment était venue sa passion, les yeux de Nola se mirent à briller :
« Cette nuit là au plus profond de la forêt de Lente. Ce cerf 8 cors qui bramait à quelques dizaines de mètres de moi. C’était si beau ! A la fois sauvage, primaire et tout simplement magnifique ! »
Dernière édition par SHERKANE le Lun 13 Oct - 23:06, édité 2 fois
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: Naissance d’une vocation
Lyon, les soyeux, le Vercors, une panne du train : le décor est soigneusement planté...
Le suspense reste entier jusqu'à la chute !
Formidablement bien menée, cette histoire.
Quelle imagination,
Le suspense reste entier jusqu'à la chute !
Formidablement bien menée, cette histoire.
Quelle imagination,
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: Naissance d’une vocation
Très beau texte, fluide...
Avec une fin qui me plait beaucoup où chaque mot convient parfaitement pour qu'on ressente l'atmosphère vécue.
Superbe !
Avec une fin qui me plait beaucoup où chaque mot convient parfaitement pour qu'on ressente l'atmosphère vécue.
Superbe !
SO-leille- Kaléïd'habitué
- Humeur : Joyeuse
Re: Naissance d’une vocation
Tes mots m'ont emportée pour ce voyage interrompu par un incident qui transformera la destinée de ton héroïne.
J'ai partagé l'inquiétude des passagers du train, dans l'atmosphère angoissante de la forêt traversée, je me suis alarmée à la disparition momentanée de l'héroïne, j'ai regretté la réaction excessive de son père et finalement je me suis réjouie de la naissance de cette vocation. En un mot j'ai vraiment vécu ton histoire
J'ai partagé l'inquiétude des passagers du train, dans l'atmosphère angoissante de la forêt traversée, je me suis alarmée à la disparition momentanée de l'héroïne, j'ai regretté la réaction excessive de son père et finalement je me suis réjouie de la naissance de cette vocation. En un mot j'ai vraiment vécu ton histoire
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: Naissance d’une vocation
Waouh!!!! Passionnant! Tu m'as entraînée dès la seconde phrase et pas lâchée de bout en bout !!
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: Naissance d’une vocation
De mi septembre à mi octobre une partie de la forêt de Lente est interdite à tout randonneur. C'est en effet là où se concentre cerfs et biches pour cette période de rut.
Un sentier longe cette zone et des affuts y ont été aménagés pour entendre le brame et qui sait! Voir un cerf de "près"!
J'y suis allé en début de semaine à la nuit tombée. Cela bramait de partout mais pas vu de cerf. Juste une biche. Il devait avoir proche de nous un cerf car son brame était très proche.
Je n'ai ni entendu ni vu de loups mais je sais qu'il y en a dans le Vercors et dans ce coin du plateau d'Ambel. Le loup est revenu en France, ça c'est sûr!!
Voilà mes sources d'inspiration pour cette consigne
Un sentier longe cette zone et des affuts y ont été aménagés pour entendre le brame et qui sait! Voir un cerf de "près"!
J'y suis allé en début de semaine à la nuit tombée. Cela bramait de partout mais pas vu de cerf. Juste une biche. Il devait avoir proche de nous un cerf car son brame était très proche.
Je n'ai ni entendu ni vu de loups mais je sais qu'il y en a dans le Vercors et dans ce coin du plateau d'Ambel. Le loup est revenu en France, ça c'est sûr!!
Voilà mes sources d'inspiration pour cette consigne
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: Naissance d’une vocation
Ton récit me fait regretter de n'avoir pas répondu à l'invitation de notre Association de rando pour se rendre comme chaque année entendre le brame du cerf quelque part en Corrèze...
Tu maitrises totalement l'art de conter : ne serais-tu pas quelque part un peu magicienne ?
Tu maitrises totalement l'art de conter : ne serais-tu pas quelque part un peu magicienne ?
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: Naissance d’une vocation
Une belle vocation qui est née d'une belle histoire, magnifiquement contée. Je me suis laissée entrainée du début a la fin.
Myriel- Kaléïd'habitué
- Humeur : Girouette
Re: Naissance d’une vocation
Une atmosphère très bien rendue avec une chute que l'on n'attend pas. Un texte qui se lit très facilement et d'une seule traite. Sherkane :
Invité- Invité
Re: Naissance d’une vocation
Magnifique récit jusqu'au bout, frisson et suspens garanti, tout est si bien décrit.
Bravo aussi pour ta description ferroviaire, je m'y croyais.
Bravo aussi pour ta description ferroviaire, je m'y croyais.
trainmusical- Occupe le terrain
- Humeur : à vous de juger :-)
Re: Naissance d’une vocation
Un voyage ordinaire qui vire au cauchemar pour la plupart des voyageurs et à l’aventure merveilleuse pour la fillette, dont la sensibilité nécessaire à la future photographe est déjà annoncée par ce passage :
elle en humait l’odeur toujours différente selon la saison. Elle aimait cette lente traversée rythmée par le bruit des essieux sur les rails. Elle faisait corps avec la locomotive quand celle-ci peinait dans les montées et crachait des tonnes de vapeur.
J’ai trouvé cette façon de traiter la consigne très originale, avec une atmosphère envoutante de mystère, de conte à la fois terrifiant et merveilleux.
Deux petites remarques :
A Vassieux en Vercors la journée fut profitable à Nola et son père, les affaires prospères
Ça ne colle pas puisque les affaires prospères est un des groupes sujet de fut.
devenu une célèbre photographe : devenue.
elle en humait l’odeur toujours différente selon la saison. Elle aimait cette lente traversée rythmée par le bruit des essieux sur les rails. Elle faisait corps avec la locomotive quand celle-ci peinait dans les montées et crachait des tonnes de vapeur.
J’ai trouvé cette façon de traiter la consigne très originale, avec une atmosphère envoutante de mystère, de conte à la fois terrifiant et merveilleux.
Deux petites remarques :
A Vassieux en Vercors la journée fut profitable à Nola et son père, les affaires prospères
Ça ne colle pas puisque les affaires prospères est un des groupes sujet de fut.
devenu une célèbre photographe : devenue.
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: Naissance d’une vocation
Arf
Merci Tober!!
je corrige "devenue" et je reconnais que la phrase que tu cites est un peu maladroite. je vais voir ce que j'en fais...
Merci Tober!!
je corrige "devenue" et je reconnais que la phrase que tu cites est un peu maladroite. je vais voir ce que j'en fais...
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: Naissance d’une vocation
Trés agréable à lire ton histoire Sherkanne. Voyager de la Croix Rousse au haut plateau du Vercors ne peut être que magique. De plus tu nous entraines avec toi dans cette belle aventure où la nature à toute sa place et tu ne ménages pas ta peine. Cela donne envie d'y être.
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
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