Ne te mets pas martel en tête
+4
Sel.
Escandélia
Admin
catsoniou
8 participants
Page 1 sur 1
Ne te mets pas martel en tête
A toi,
petit dernier d'une fratrie limousine, le « catsoniou »
Toi, l'impatient qui voudrait tant être grand, je dois te dire ceci : tu n'imagines pas à quelle vitesse passe le temps... Un jour, tu te retrouves à l'aube de la vieillesse sans la voir venir. Au risque de te chagriner, c'est ce que tu vis aujourd'hui qui remonte le plus à la surface. Oui, la monotonie de ton quotidien peuple mon esprit : jeux, menus travaux qui te sont confiés, plats confectionnés par la mère, voisins, petits copains et copines, sans oublier l'instit, voire même le curé qui n'est point ton confident !
A l'avance, je réponds à ta question : la vie t'apporte son lot de joies, surprises, malheurs, déceptions en alternance, sans forcément requérir ton avis et chacun de ces éléments trouve sa place avec plus ou moins de bonheur comme dans le buffet de la salle à manger qui recèle un sacré fouillis, mais vois-tu, ce quotidien de l'enfance, tu le retrouves sans le chercher comme ce chocolat dont tu abuserais quelque peu si tu ne craignais pas le courroux de la mère découvrant ton larcin !
Sur d'autres étagères sont rangés les souvenirs plus ou moins précis des années écoulées. En un demi-siècle et même un peu plus, il s'en passe des choses qui bout à bout, produiraient un film aussi long qu'un jour sans pain ou encore un roman à épisodes. La mémoire n'étant pas élastique à l'infini, des périodes entières laissent une trace plus ou moins diffuse alors que l'enfance...
Tiens, par exemple, j'entends encore le tip-tap de la faux battue par le père ou les socques de l'Albert résonnant sous la fenêtre et encore le ronflement des battages alors que tout ceci est depuis fort longtemps rangé au placard des accessoires désuets. Ne me demande pas ce que j'ai fait jeudi dernier : j'ai oublié. Par contre, toi, tu as mis à profit ce jeudi automnal pour fabriquer des petits moulins dans le ruisseau au détriment de cette leçon de géographie dont le lendemain tu ne savais pas un traitre mot, et l'instit a méchamment tiré sur ta tignasse. Rassure-toi , tu ne lui en tiendras pas rancune.
Et les filles, les femmes, tu n'as pas tout oublié, me diras-tu ? Je vais peut-être te surprendre : elles m'apparaissent toujours aussi mystérieuses que l'est ta voisine de table d'écolier. Toutefois, elles sont le soleil de notre vie, même si parfois elles nous tapent sur le système... avec réciprocité très certainement !
Oui, je sais : parfois tu te passerais volontiers de ta part de travail jugée fastidieuse tout en t'interrogeant sur le métier que tu exerceras plus tard. Ne te mets pas martel en tête, tu ne choisiras pas forcément, mais tu aimeras ton boulot, quoique ta préférence se portera sur les vacances, cela va de soi !
Chaque chose en son temps : profite du temps qui passe ! Sois persuadé d'une vérité récurrente : il reste toujours quelque chose de l'enfance, toujours.
Affectueusement
cats
petit dernier d'une fratrie limousine, le « catsoniou »
Toi, l'impatient qui voudrait tant être grand, je dois te dire ceci : tu n'imagines pas à quelle vitesse passe le temps... Un jour, tu te retrouves à l'aube de la vieillesse sans la voir venir. Au risque de te chagriner, c'est ce que tu vis aujourd'hui qui remonte le plus à la surface. Oui, la monotonie de ton quotidien peuple mon esprit : jeux, menus travaux qui te sont confiés, plats confectionnés par la mère, voisins, petits copains et copines, sans oublier l'instit, voire même le curé qui n'est point ton confident !
A l'avance, je réponds à ta question : la vie t'apporte son lot de joies, surprises, malheurs, déceptions en alternance, sans forcément requérir ton avis et chacun de ces éléments trouve sa place avec plus ou moins de bonheur comme dans le buffet de la salle à manger qui recèle un sacré fouillis, mais vois-tu, ce quotidien de l'enfance, tu le retrouves sans le chercher comme ce chocolat dont tu abuserais quelque peu si tu ne craignais pas le courroux de la mère découvrant ton larcin !
Sur d'autres étagères sont rangés les souvenirs plus ou moins précis des années écoulées. En un demi-siècle et même un peu plus, il s'en passe des choses qui bout à bout, produiraient un film aussi long qu'un jour sans pain ou encore un roman à épisodes. La mémoire n'étant pas élastique à l'infini, des périodes entières laissent une trace plus ou moins diffuse alors que l'enfance...
Tiens, par exemple, j'entends encore le tip-tap de la faux battue par le père ou les socques de l'Albert résonnant sous la fenêtre et encore le ronflement des battages alors que tout ceci est depuis fort longtemps rangé au placard des accessoires désuets. Ne me demande pas ce que j'ai fait jeudi dernier : j'ai oublié. Par contre, toi, tu as mis à profit ce jeudi automnal pour fabriquer des petits moulins dans le ruisseau au détriment de cette leçon de géographie dont le lendemain tu ne savais pas un traitre mot, et l'instit a méchamment tiré sur ta tignasse. Rassure-toi , tu ne lui en tiendras pas rancune.
Et les filles, les femmes, tu n'as pas tout oublié, me diras-tu ? Je vais peut-être te surprendre : elles m'apparaissent toujours aussi mystérieuses que l'est ta voisine de table d'écolier. Toutefois, elles sont le soleil de notre vie, même si parfois elles nous tapent sur le système... avec réciprocité très certainement !
Oui, je sais : parfois tu te passerais volontiers de ta part de travail jugée fastidieuse tout en t'interrogeant sur le métier que tu exerceras plus tard. Ne te mets pas martel en tête, tu ne choisiras pas forcément, mais tu aimeras ton boulot, quoique ta préférence se portera sur les vacances, cela va de soi !
Chaque chose en son temps : profite du temps qui passe ! Sois persuadé d'une vérité récurrente : il reste toujours quelque chose de l'enfance, toujours.
Affectueusement
cats
catsoniou- Kaléïd'habitué
- Humeur : couci - couça
Re: Ne te mets pas martel en tête
Super moment de lecture !
Et pour le premier paragraphe je dis:
Et pour le premier paragraphe je dis:
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: Ne te mets pas martel en tête
Tout comme Admin, j'ai moi aussi bien aimé voyager dans ton quotidien d'avant, comme dans celui de maintenant. Mais on dirait que tu cherche à te réconforter, non ?
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: Ne te mets pas martel en tête
J'aime ce regard de tendresse que tu portes sur ton enfance.
Et la conclusion "profite du temps qui passe" me semble particulièrement appropriée !
pour ce joli texte
Et la conclusion "profite du temps qui passe" me semble particulièrement appropriée !
pour ce joli texte
Sel.- Kaléïd'habitué
- Humeur : Entre bleu clair et bleu foncé
Re: Ne te mets pas martel en tête
Tu regardes avec tendresse l'enfant que tu étais et tu fais surgir de ta mémoire un quotidien que nous partageons et qui éveille sûrement des échos chez certains d'entre nous. Merci !
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: Ne te mets pas martel en tête
Tiens ! Toi aussi tu évoques tes souvenirs Cats ? Tu dois le faire mieux que moi je présume ! Hum...!
Je l'aime beaucoup ton texte : il a le parfum de notre enfance paysanne.
Je l'aime beaucoup ton texte : il a le parfum de notre enfance paysanne.
Invité- Invité
Re: Ne te mets pas martel en tête
En lisant ton texte je vois un gamin en culottes courtes qui arrête un moment ses activités de gosse pour écouter avec attention et bouche bée les doux conseils avisés que tu lui offres.
Il est attachant ce petit, et tu es attachant en lui parlant ainsi.
Il est attachant ce petit, et tu es attachant en lui parlant ainsi.
silhène- Kaléïd'habitué
- Humeur : la meilleure possible....
Re: Ne te mets pas martel en tête
J'ai beaucoup aimé ton texte bien écrit avec des petits détails de l'enfance qu'on n'oubliera jamais. Par contre pour le passé proche c'est fou ce qu'on peut oublier. J'adore
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: Ne te mets pas martel en tête
Une belle évocation d'une enfance paysanne. Mais ce texte est finalement assez amer car ce qu'il promet à l'enfant n'est pas très exaltant. Très beau, le couplet sur les filles et les femmes.
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
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