J'ai brisé le miroir
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Nerwen
Pati
Myriel
Sherkane
Cassy
9 participants
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J'ai brisé le miroir
J’ai brisé le miroir, je ne supportais plus de me voir ! Tout était si étriqué : les meubles, les murs, le présent sans aucun sens, aussi éphémère que le temps qu’il me restait à vivre. Je me sentais à l’étroit dans mes habits de vieillard, entre un passé lourd comme un dictionnaire et un futur se réduisant comme peau de chagrin.
Cette enveloppe ridicule, déformée par les ans, cette forme sans forme qui se reflétait dans le miroir, je finissais par la haïr. Elle m’était devenue aussi indigeste que le sourire béat de mes petits-enfants devant « les anges de la télé réalité » !
J’ai empoigné le miroir et malgré son poids imposant, je l’ai traîné jusqu’au balcon et je l’ai balancé par-dessus la rambarde. Il s’est écrasé six mètres plus bas dans un grand fatras de verre brisé. Je me suis alors senti aussi léger qu’une plume. Il y avait bien longtemps que je n’avais pas fait de bêtise, depuis mon adolescence il me semble. Cela m’avait valu la dernière paire de gifles envoyée par mon père qui m’avait fait rouler au bas des escaliers. Je venais de casser la montre de ma grand-mère, pour voir si j’étais capable de la réparer, je n’avais pas réussi. Mon père m’avait fracassé le nez en représailles, pour me mettre au pli, il avait échoué, je le méprisais. Un point partout, balle au centre.
Je me suis penché au-dessus du balcon pour admirer mon œuvre. Le beau miroir Louis XVI, si cher à mon père, gisait par terre. Ce foutu miroir que j’avais toujours détesté, même en mille morceaux, il me narguait. À moins que, débarrassé de tout ce qui l’encombrait, nu et sans défense, au bord de l’abandon, il ne m’appelle à l’aide!
Au milieu du jardin enneigé, mon œil fut attiré par le reflet d’arbres majestueux sur une herbe fraîche. Je connaissais bien ces arbres, des chênes centenaires qui avaient été arrachés depuis longtemps déjà. J’entendis alors le rire de mon frère jouant avec le chien qui jappait de plaisir, puis, plus lointain, la voix de ma mère qui nous appelait pour le dîner.
Vite ! Courir à la fontaine se laver les mains avant de passer à table. Je n’ai eu qu’à tendre les bras pour me laisser happer par le mince filet d’eau dessinant mon passé, j’ai plongé, avant de remonter à la surface, de l’autre côté du miroir.
Cette enveloppe ridicule, déformée par les ans, cette forme sans forme qui se reflétait dans le miroir, je finissais par la haïr. Elle m’était devenue aussi indigeste que le sourire béat de mes petits-enfants devant « les anges de la télé réalité » !
J’ai empoigné le miroir et malgré son poids imposant, je l’ai traîné jusqu’au balcon et je l’ai balancé par-dessus la rambarde. Il s’est écrasé six mètres plus bas dans un grand fatras de verre brisé. Je me suis alors senti aussi léger qu’une plume. Il y avait bien longtemps que je n’avais pas fait de bêtise, depuis mon adolescence il me semble. Cela m’avait valu la dernière paire de gifles envoyée par mon père qui m’avait fait rouler au bas des escaliers. Je venais de casser la montre de ma grand-mère, pour voir si j’étais capable de la réparer, je n’avais pas réussi. Mon père m’avait fracassé le nez en représailles, pour me mettre au pli, il avait échoué, je le méprisais. Un point partout, balle au centre.
Je me suis penché au-dessus du balcon pour admirer mon œuvre. Le beau miroir Louis XVI, si cher à mon père, gisait par terre. Ce foutu miroir que j’avais toujours détesté, même en mille morceaux, il me narguait. À moins que, débarrassé de tout ce qui l’encombrait, nu et sans défense, au bord de l’abandon, il ne m’appelle à l’aide!
Au milieu du jardin enneigé, mon œil fut attiré par le reflet d’arbres majestueux sur une herbe fraîche. Je connaissais bien ces arbres, des chênes centenaires qui avaient été arrachés depuis longtemps déjà. J’entendis alors le rire de mon frère jouant avec le chien qui jappait de plaisir, puis, plus lointain, la voix de ma mère qui nous appelait pour le dîner.
Vite ! Courir à la fontaine se laver les mains avant de passer à table. Je n’ai eu qu’à tendre les bras pour me laisser happer par le mince filet d’eau dessinant mon passé, j’ai plongé, avant de remonter à la surface, de l’autre côté du miroir.
Cassy- Admin
- Humeur : Déterminée
Re: J'ai brisé le miroir
Une approche originale! Je me demandais quand tu ferais allusion à la photo et au reflet des arbres.
Sherkane- Kaléïd'habitué
- Humeur : ....
Re: J'ai brisé le miroir
J'aime beaucoup cette façon d'aborder la consigne :
cette peur de vieillir, quelle belle image d’ailleurs que ce
Les souvenirs pénibles du début évincés par la joie de retrouver sa jeunesse. Passer de l'autre coté pour retrouver les rires d'enfants
cette peur de vieillir, quelle belle image d’ailleurs que ce
Je me sentais à l’étroit dans mes habits de vieillard, entre un passé lourd comme un dictionnaire et un futur se réduisant comme peau de chagrin.
Les souvenirs pénibles du début évincés par la joie de retrouver sa jeunesse. Passer de l'autre coté pour retrouver les rires d'enfants
Myriel- Kaléïd'habitué
- Humeur : Girouette
Re: J'ai brisé le miroir
j'ai beaucoup aimé ce personnage, et le texte est très agréable à lire, et tu entraines ton lecteur à ta suite. meme si la fin était prévisible, tu l'as très bien amenée, et j'espère qu'au moins, de ce coté-là du miroir, ce p'tit vieux aura le sourire aux lèvres pour l'éternité
Pati- Kaléïd'habitué
- Humeur : mouvante
Re: J'ai brisé le miroir
Il arrive en effet un moment où l'on a envie de briser le miroir, témoin impitoyable de notre décrépitude, mais ton approche est tout à fait bouleversante et c'est un vrai bonheur de lecture.
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: J'ai brisé le miroir
Je ne lis jamais avant d'écrire, j'ai failli "pondre" un texte du même genre en pensant à la chanson d'Aznavour " Tu t'laisses aller"
Après c'était tellement démoralisant que j'ai arrêté.
J'ai bien fait tu racontes bien mieux !
Après c'était tellement démoralisant que j'ai arrêté.
J'ai bien fait tu racontes bien mieux !
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: J'ai brisé le miroir
Très belle idée, que de briser le miroir qui nous renvoie notre image nous permet de retrouver notre enfance.
Une belle histoire bien racontée,, dont on ne peut pas lire la fin sans émotion
Au milieu du jardin enneigé, mon œil fut attiré par le reflet d’arbres majestueux sur une herbe fraîche : je n’ai pas compris comment l’herbe peut refléter quelque chose. Dans la rosée de l’herbe fraiche ?
dans un grand fatras de verre brisé : fatras ou fracas ? Je me suis posé la question parce que les deux seraient possibles, même si le second est le plus attendu.
Une belle histoire bien racontée,, dont on ne peut pas lire la fin sans émotion
Au milieu du jardin enneigé, mon œil fut attiré par le reflet d’arbres majestueux sur une herbe fraîche : je n’ai pas compris comment l’herbe peut refléter quelque chose. Dans la rosée de l’herbe fraiche ?
dans un grand fatras de verre brisé : fatras ou fracas ? Je me suis posé la question parce que les deux seraient possibles, même si le second est le plus attendu.
tobermory- Kaléïd'habitué
- Humeur : Changeante
Re: J'ai brisé le miroir
Un texte violent aussi, un miroir volontairement brisé qui règle les comptes d'un père violent. Heureusement la fin nous renvoie à des moments plus heureux. Un très agréable moment de lecture.
virgul- Kaléïd'habitué
- Humeur : optimiste
Re: J'ai brisé le miroir
Mon passage préféré
Là aussi, je reste en admiration devant les descriptions riches en images et en émotions. Je vois très bien la scène et j'imagine combien ton petit vieux a dû avoir le coeur léger ensuite.
Cassy a écrit:
Je me suis penché au-dessus du balcon pour admirer mon œuvre. Le beau miroir Louis XVI, si cher à mon père, gisait par terre. Ce foutu miroir que j’avais toujours détesté, même en mille morceaux, il me narguait. À moins que, débarrassé de tout ce qui l’encombrait, nu et sans défense, au bord de l’abandon, il ne m’appelle à l’aide!
Là aussi, je reste en admiration devant les descriptions riches en images et en émotions. Je vois très bien la scène et j'imagine combien ton petit vieux a dû avoir le coeur léger ensuite.
Mesange- Kaléïd'habitué
- Humeur : en phase de reconcentration
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