Lettre à mon fils
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SO-leille
Nerwen
Escandélia
Amanda.
8 participants
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Lettre à mon fils
Mon cher fils,
Au moment où tu liras cette lettre, je ne serai plus de ce monde.
Je la confie aux bons soins de Maître Montagnard, mon notaire, à charge pour lui de te la remettre scellée, après mon décès qui ne saurait tarder.
Avant que mes dernières forces ne me quittent, j’ai le devoir de soulager ma conscience. Je n’en ai pas eu le courage de mon vivant, craignant ta réaction souvent assez mordante à mon égard.
Oui, je sais, tu me répondras que « les chiens ne font pas des chats » et en cela tu aurais pleinement raison !
Il m’est arrivé une chose inimaginable, incroyable, inouïe et que je n’ai jamais regrettée. Je n’en ai jamais parlé à personne…
Voici :
Le jour de mes 18 ans, je reçus enfin la permission de mes parents de « sortir » avec mes copines et ce, jusqu’à minuit !
Autre chose inimaginable aujourd’hui, je sais…
Ce samedi soir-là, Ariane, Ghislaine( mes amies pour la vie !) et moi franchissions pour la première fois le seuil de « L’Os à Moelle », club de jeunes fondé par le truculent vicaire de notre paroisse, l’Abbé Paul, dit « Popol ».
Popol avait compris que la seule façon « acceptable » de faire se rencontrer filles et garçons du coin , était d’utiliser la cave située sous l’église et de la transformer, en tout bien tout honneur, en « boîte » comme on dit maintenant. Lui-même y trouvait son compte en y passant ses soirées du week-end en compagnie de joyeux drilles et de quelques whisky-cocas.
Grand amateur de musique, il jouait les impresarios en faisant monter sur scène l’un ou l’autre chanteur amateur, lui donnant ainsi une chance de se faire connaître.
Ce soir-là donc, le chanteur s’appelait Jacques B. C’était un grand type très maigre, qui chantait des airs de « scouts » à la veillée en s’accompagnant à la guitare. Ariane et Ghislaine le trouvèrent très laid, moi pas. J’étais fascinée par ses yeux bleus, ses grandes mains et son sourire carnassier.
A la fin de son tour de chant, il vint prendre un verre au bar avec Popol. Pas fier, il m’offrit un Coca et le courant tout de suite passa. Doux, gentil, il s’intéressa à ma modeste personne, me dit combien il me trouvait fraîche et charmante, « à croquer » disait-il !
Et moi, moi, je le mangeais des yeux, je l’écoutais parler de son rêve, de « monter » à Paris, des nouvelles chansons qu’il composait lui-même, la nuit…
Je buvais ses paroles, refusais les invitations à danser jusqu’à ce qu’il s’en aille, seul, sur sa moto dans la nuit de novembre, celle de mes 18 ans.
Fin juin de l’année suivante, je terminai mes études tout en continuant à fréquenter « L’Os » de Popol.
Jacques, entretemps officiellement connu sous le nom de Jacques Brel, revint chanter le 3O juin exactement, afin de remercier Popol de l’avoir « lancé ».
Ce soir-là « Quand on n’a que l’amour » et « Une fille qui danse sur la place noyée de soleil » me chavirèrent, m’achevèrent…
Je l’aimais, j’en étais sûre désormais, il me le fallait !
Il quitta la salle sous une salve d’applaudissements, il était déjà connu chez nous.
Dans la cour, je me faufilai et lui dit « Jacques, tu pars ? »
Pas étonné pour un sou, il me rétorqua « Oui, je vais à Paris…enfin ! »
« Tu m’emmènes, dis ? »
« Tu es certaine, petite ? »
Et c’est ainsi que je suivis Jacques à Paris.
Coup de tête, coup de folie qu’il fallut à tout prix dissimuler à tous.
Jacques était marié et déjà papa. Je ne l’appris que bien plus tard !
Officiellement, je séjournais chez la soeur d’Ariane et on expliqua mon départ précipité sous un fallacieux prétexte de baby-sitting.
Voilà, cher fils, tu sais tout, enfin presque.
Je suis restée plus d’un an, enfin j’ai tenu…
Parce qu’avec Jacques, ses copains, ses nuits en cabaret enfumé à refaire le monde, j’ai adoré ( si, si !) et puis détesté.
Je suis rentrée, la bouche pleine de mensonges et le cœur en lambeaux. Très vite, j’ai séduit le premier venu, celui que tu appelais « Papa » ( Dieu ait son âme !)
Oui, mais voilà, ce n’était pas le bon !
Pardonne-moi ma folie …
Je t’aime, Jacquot !
Maman
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: Lettre à mon fils
Je me disais aussi ! la chute en fait, je l'attendais, on la voyait se profiler au détour de tes souvenirs. Dis nous, le fiston, chante-t-il aussi bien que son père ?
Escandélia- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: Lettre à mon fils
Un bien beau mélodrame avec tous les ingrédients pour faire pleurer Margot (et les autres).
Nerwen- Modératrice
- Humeur : Légère
Re: Lettre à mon fils
je terminai mes études tout en continuant à fréquenter « L’Os » de Popol.
J'adore entre autres truculences !!!
J'adore entre autres truculences !!!
SO-leille- Kaléïd'habitué
- Humeur : Joyeuse
Re: Lettre à mon fils
Voilà un sujet documenté… Façon écrivain ou grand(e) journaliste…
Brel — les scouts — l'os à moelle — etc.
j'ai bien aimé.
Un bémol quand même : la chute est un peu trop téléphonée… On devine un peu trop vite comment ça va finir…
Et encore un fils qui va faire déterrer un cadavre…
Brel — les scouts — l'os à moelle — etc.
j'ai bien aimé.
Un bémol quand même : la chute est un peu trop téléphonée… On devine un peu trop vite comment ça va finir…
Et encore un fils qui va faire déterrer un cadavre…
AlainX- Kaléïd'habitué
- Humeur : stable
Re: Lettre à mon fils
J'ai vachement aimé ton texte Amanda et je le trouve super original (même si on se doute de la fin comme dit Alainx)
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: Lettre à mon fils
Alors ça, Amanda, s'être fait mettre un polichinelle dans le tiroir par Jacques Brel ! C'est pas banal mais après tout...Il se passe tellement de choses en Belgique ! Ton fils va regretter de ne pas avoir appris la nouvelle plus tôt : il aurait pu avoir une part d'héritage et sans être vénal, quand même, faut pas cracher dans la soupe et puis ça n'aurait été que justice.
Maintenant, si on allait chercher JB aux Marquises pour faire un test adn, tu aurais bonne mine hein ? Comme la fille de YM !
Maintenant, si on allait chercher JB aux Marquises pour faire un test adn, tu aurais bonne mine hein ? Comme la fille de YM !
Invité- Invité
Re: Lettre à mon fils
Très bon . Tu as raison :Faut pas regretter les bons temps qu'on a passé. Faudrait plutôt regretter les bons temps qu'on a loupés. "Non rien rien je ne regrette rien ni le bien qu'on m'a fait ni mal tout çà m'est bien égal" chantait Edith Piaf qui en a quand même bien bavé. La fin était attendue mais je me demandais si tu allais oser...
Charlotte- Kaléïd'habitué
- Humeur : joyeuse
Re: Lettre à mon fils
Pour tout vous dire : l'idée de ce texte remanié vient d'un atelier d'écriture chez Coumarine.
A l'époque, je n'avais pas osé la fin...
MAIS, j''avais envoyé ce texte à mon "vrai" fils qui s'est précipité chez ma mère pour vérifier mes dires : et oui, j'ai, une seule fois vu Jacques Brel à L'Os à Moëlle ( qui existe toujours, mais sans Popol ), il ne m'a évidemment pas remarquée, je suis effectivement partie deux mois à Paris chez une amie....
De plus le grand Jacques habitait avec sa femme et ses filles deux rues plus loin que chez moi, de quoi fantasmer !
Mon fils n'en croyait pas ses oreilles, l'histoire a fait le tour de la famille, jusqu'à ce que j'avoue que j'avais tout inventé.
Euh, et son nom est Philippe et son papa est vraiment son papa
A l'époque, je n'avais pas osé la fin...
MAIS, j''avais envoyé ce texte à mon "vrai" fils qui s'est précipité chez ma mère pour vérifier mes dires : et oui, j'ai, une seule fois vu Jacques Brel à L'Os à Moëlle ( qui existe toujours, mais sans Popol ), il ne m'a évidemment pas remarquée, je suis effectivement partie deux mois à Paris chez une amie....
De plus le grand Jacques habitait avec sa femme et ses filles deux rues plus loin que chez moi, de quoi fantasmer !
Mon fils n'en croyait pas ses oreilles, l'histoire a fait le tour de la famille, jusqu'à ce que j'avoue que j'avais tout inventé.
Euh, et son nom est Philippe et son papa est vraiment son papa
Amanda.- Modératrice
- Humeur : résolument drôle
Re: Lettre à mon fils
Rohhh, j'ai failli y croire, tellement ça semble réaliste. On a presque vécu le scoop du siècle
N'empêche, tu as bien de la chance quand même de l'avoir vu chanter "en vrai"
N'empêche, tu as bien de la chance quand même de l'avoir vu chanter "en vrai"
silhène- Kaléïd'habitué
- Humeur : la meilleure possible....
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